Adresse du document : http://www.senat.fr/rap/r02-015-1/r02-015-141.html N° 15 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003 Annexe au procès-verbal de la séance du 9 octobre 2002 RAPPORT D\'INFORMATION FAIT au nom de la mission commune d\'information (1) chargée de dresser un bilan de la politique de la montagne et en particulier de l\'application de la loi du 9 janvier 1985, de son avenir, et de ses nécessaires adaptations, Par M. Jean-Paul AMOUDRY, Sénateur. TOME I : RAPPORT (1) Cette mission commune d\'information est composée de : M. Jacques Blanc, président ; M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur ; MM. Auguste Cazalet, Jean-Pierre Vial, Michel Moreigne, Mme Josette Durrieu, M. Pierre Hérisson, vice-présidents ; MM. Gérard Bailly, Jean-Paul Émin, François Fortassin, Mme Josiane Mathon, M. André Rouvière, secrétaires ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Jean-Pierre Bel, Roger Besse, Jean Boyer, André Ferrand, Charles Ginésy, Georges Gruillot, Pierre Jarlier, Philippe Leroy, Paul Loridant, Jean-Pierre Masseret, Paul Natali, Roger Rinchet, Bernard Saugey, Daniel Soulage. Aménagement du territoire>. PROPOSITIONS DE LA MISSION COMMUNE D\'INFORMATION PROMOUVOIR UNE DÉMARCHE CONCERTÉE POUR LA PROTECTION DU PATRIMOINE NATUREL Proposition n° 1 : Déléguer par voie de convention la gestion des parcs nationaux aux collectivités territoriales. Proposition n° 2 : Veiller, en cas de chevauchement de territoires, à ce que la politique du pays respecte les orientations de protection et de développement du parc naturel régional. ENCOURAGER UNE GESTION INTÉGRÉE DES HAUTS BASSINS VERSANTS Proposition n° 3 : Déconcentrer la procédure d\'élaboration d\'un contrat de rivière, au niveau du préfet coordonnateur de bassin. Proposition n° 4 : Elaborer des schémas d\'aménagement par bassin versant, dans la concertation, le consensus et la co-responsabilité pour fixer les objectifs à atteindre à moyen terme. Proposition n° 5 : Etablir pour chaque bassin versant un système intégré d\'observation et de monitoring fiable et représentatif et constituer des bases de données. RELANCER UNE POLITIQUE FORESTIÈRE VALORISANTE Proposition n° 6 : Appliquer l\'article 32 de la loi du 9 juillet 2001 d\'orientation sur la forêt reconnaissant en zone de montagne à une association foncière forestière un droit de délaissement sur des parcelles dont les propriétaires n\'ont pu être identifiés. Proposition n° 7 : Instaurer un droit de préemption au profit des communes, au moment de la mise en vente de parcelles forestières ayant vocation de forêt et de protection d\'intérêt général. Proposition n° 8 : Conforter les financements de l\'ADEME en faveur de projets soutenant le bois-énergie. Proposition n° 9 : Soutenir financièrement les actions menées par l\'OEFM en faveur des forêts de montagne. RENFORCER LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS Proposition n° 10 : S\'engager sur une hausse raisonnable des crédits d\'entretien et d\'investissements RTM. Proposition n° 11 : Préciser les participations financières des différents services de l\'Etat aux missions remplies pour leur compte par les services RTM. Proposition n° 12 : Prendre en compte le « surcoût montagne » dans l\'élaboration des PPR. Proposition n° 13 : Instaurer une commission de concertation consultée lors de l\'élaboration du plan de prévention des risques naturels, dans laquelle siègent des représentants des communes. Proposition n° 14 : Définir un périmètre pertinent pour l\'élaboration d\'un PPR. SOUTENIR UNE AGRICULTURE DE QUALITÉ ET COMPENSER LES SERVICES A L\'ENVIRONNEMENT Proposition n° 15 : Sans bouleverser les modalités de calcul et d\'attribution de l\'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) retenues dans notre pays, renforcer la souplesse du dispositif et notamment permettre l\'augmentation des primes versées aux 25 premiers hectares afin de favoriser les petites exploitations. Proposition n° 16 : Conformément à une logique de projet et d\'entreprise agricole, mettre l\'accent sur les aides à l\'installation des jeunes agriculteurs sous forme de prêts à taux réduits, en complément des dotations actuelles dont le montant est nécessairement limité. Proposition n° 17 : Revaloriser les aides à l\'investissement de l\'agriculture de montagne qui sont la clef de son avenir et de sa création de valeur ajoutée, et réviser régulièrement les plafonds des aides, afin d\'éviter un alourdissement excessif du poids des investissements sur les agriculteurs. Proposition n° 18 : Soutenir la mise aux normes des exploitations de montagne qui ne bénéficient pas du programme de maîtrise des pollutions d\'origine agricole (PMPOA) afin de ne pas entraver leur nécessaire modernisation et leur éligibilité aux aides européennes. Proposition n° 19 : Veiller à l\'efficacité de la mise en oeuvre de la nouvelle prime herbagère agri-environnementale (P.H.A.E.) et, s\'agissant de son montant, à la réduction de l\'écart entre les subventions aux différentes formes d\'alimentation du bétail. Proposition n° 20 : Poursuivre la réduction du différentiel d\'aide constaté entre l\'hectare agricole montagnard et l\'hectare agricole en zone de plaine. Proposition n° 21 : Lever les obstacles de la réglementation européenne au développement de l\'agriculture biologique en montagne. Proposition n° 22 : Soutenir prioritairement les initiatives de structuration de filières de production et de transformation qui sont la clef d\'une meilleure répartition de la valeur ajoutée des produits de montagne. Proposition n° 23 : Maintenir le principe de l\'introduction en agriculture d\'une logique de projet d\'entreprise et d\'innovation, au moyen du contrat territorial d\'exploitation (CTE), auquel souscrivent les exploitants de montagne ; tout en réduisant les lourdeurs administratives du dispositif initial. Proposition n° 24 : Déplafonner en zone de montagne le volet économique des CTE pour prendre en compte le surcoût des investissements. Proposition n° 25 : Etudier la mise en place d\'une « dotation sylvo-pastorale » comprise ou non dans les mécanismes actuels de dotation globale de fonctionnement et de dotation de solidarité rurale attribuées aux collectivités locales. Proposition n° 26 : Approfondir les notions de droits d\'utilisation des surfaces collectives et définir un cadre national « CTE estives » pour les groupements pastoraux et les associations foncières pastorales exploitant elles-mêmes. Proposition n° 27 : Elaborer un statut spécifique des surfaces à usage pastoral permettant d\'élargir la vocation de ces espaces naturels au multi-usage. Proposition n° 28 : Approfondir la réflexion sur les signes de qualité ou les mentions valorisantes susceptibles de mieux promouvoir l\'identification des productions à base d\'herbe. Proposition n° 29 : Mettre fin à l\'introduction des grands prédateurs incompatibles avec l\'activité pastorale. Proposition n° 30 : Préserver les quotas laitiers et augmenter les droits à produire en zone de montagne en prévoyant une affectation prioritaire à l\'installation des jeunes agriculteurs. ENCOURAGER LE TOURISME DE MONTAGNE Proposition n° 31 : Intensifier l\'action collective en faveur des jeunes et relancer, en particulier, les classes de neige. Proposition n° 32 : Promouvoir une image plus douce et plus accessible du tourisme de montagne qui ne se limite pas à l\'élite sportive ou aux cascadeurs. Proposition n° 33 : Développer les prestations annexes aux sports d\'hiver et les produits culturels y compris les visites de sites industriels pour mieux valoriser le tourisme de découverte en Montagne. Proposition n° 34 : Sauvegarder et valoriser le patrimoine culturel existant en moyenne montagne. Proposition n° 35 : Développer l\'agrotourisme à proximité des sites à fort potentiel touristique. Proposition n° 36 : Renforcer l\'accessibilité des stations et la qualité de l\'interconnexion des infrastructures de transports dans les zones de montagne. Proposition n° 37 : Exploiter les potentiels touristiques tout au long de l\'année pour réduire le coût des séjours ; poursuivre l\'étalement des vacances par un aménagement du calendrier scolaire au niveau européen. Proposition n° 38 : Rendre plus attractifs les métiers du tourisme et améliorer les conditions de vie et de logement des personnels en zone de montagne par une meilleure affectation du prélèvement au titre du 1% logement. Proposition n° 39 : Elaborer un plan de sauvetage des petites stations de ski associant l\'Etat, les régions, les départements et les communes et les établissement publics de coopération intercommunale. Proposition n° 40 : Stabiliser les exigences réglementaires d\'encadrement des activités récréatives et adapter le dispositif relatif aux refuges de montagne. CONFORTER LES SOUTIENS À L\'ARTISANAT, L\'INDUSTRIE ET LE COMMERCE Proposition n° 41 : Fidéliser le personnel en s\'inspirant des expériences réussies de recours au travail à temps partiel annualisé. Proposition n° 42 : Créer des zones franches montagnardes répondant à des critères précis sur le modèle des zones franches urbaines. Proposition n° 43 : Soutenir les progrès du thermalisme en montagne en prenant en compte toutes ses composantes, y compris la stabilité du régime de remboursement des cures thermales. Proposition n° 44 : Prendre en compte, dans les décisions d\'implantation d\'établissements sanitaires et sociaux, la vocation particulière de la montagne dans ce domaine et accentuer la démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ainsi que la mise en réseau des différents acteurs. SORTIR DE L\'IMPASSE DE LA PLURIACTIVITÉ Proposition n° 45 : Mettre en place un « numéro vert » de renseignements et un site internet consacrés aux pluriactifs. Coordonner étroitement ce dispositif tourné vers l\'usager avec une cellule interministérielle ayant vocation à analyser tous les aspects économiques, sociaux, fiscaux et éducatifs de la pluriactivité ainsi qu\'à proposer les évolutions nécessaires. Proposition n° 46 : Clarifier l\'enjeu financier que représentent les pluriactifs pour les diverses caisses de protection sociale. Proposition n° 47 : Prolonger, à titre transitoire, les possibilités de multiaffiliation offertes aux pluriactifs ayant une activité agricole. Proposition n° 48 : Combattre une entrave majeure à la pluriactivité et à la « micro-activité » en réformant la cotisation maladie forfaitaire sur la base du principe de proportionnalité. Proposition n° 49 : Simplifier l\'exercice ponctuel d\'activités indépendantes en s\'inspirant du « chèque emploi service ». Proposition n° 50 : Favoriser le développement des groupements d\'employeurs en diffusant une information adaptée et en facilitant l\'adhésion des collectivités locales et des personnes morales de droit public. Proposition n° 51 : Assouplir, en faveur des pluriactifs et des saisonniers, les conditions d\'accès à la formation initiale et continue. STRUCTURER L\'AMÉNAGEMENT DES TERRITOIRES Proposition n° 52 : Améliorer le cadre de la coopération locale en matière de services publics, en particulier en zone de montagne, ce qui pourrait notamment passer par : - au niveau national, l\'adoption de dispositions législatives et/ou la conclusion d\'un accord-cadre (fixant notamment les modalités de participation des collectivités locales au financement du maintien des services publics concernés, ainsi que la manière dont l\'Etat assurerait ce financement dans le cas des communes disposant d\'un « projet de territoire ») ; - dans le cas de La Poste, l\'inclusion dans le prochain contrat de Plan Etat-La Poste des obligations en matière de maintien des bureaux de poste en zone de montagne, la mise en oeuvre des propositions des rapports Larcher de 1997 et 1999 et la réalisation d\'expérimentations en zone de montagne. Proposition n° 53 : Renforcer les moyens de la politique de développement des services de proximité en zone de montagne, et rendre cette politique plus favorable aux zones peu densément peuplées ainsi qu\'au petit commerce traditionnel. Proposition n° 54 : Réaliser rapidement la liaison Perpignan-Figueras. Proposition n° 55 : Réaliser rapidement le TGV Lyon-Turin. Proposition n° 56 : Imposer, par des dispositions législatives, le développement de l\'itinérance, en particulier en zone de montagne. Proposition n° 57 : Faciliter l\'intervention des collectivités locales dans le domaine des télécommunications, en leur permettant de subventionner des opérateurs ou de jouer un rôle d\'opérateur. Proposition n° 58 : Expérimenter à grande échelle diverses solutions techniques (radio, satellitaire...) afin de favoriser la démocratisation de l\'accès au haut débit en zone de montagne. ADAPTER LES CONTRAINTES EN MATIÈRE D\'URBANISME Proposition n° 59 : Préciser par voie de circulaire certaines notions utilisées par la loi « montagne » (continuité ; adaptation, réfection et extension limitée des constructions existantes ; terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières ; patrimoine naturel et culturel montagnard ; chalet d\'alpage). Proposition n° 60 : Harmoniser par circulaire les modalités de retrait des certificats d\'urbanisme par l\'administration. Proposition n° 61 : Supprimer la référence à la notion de hameau, ou faire préciser cette notion par les prescriptions particulières de massif. Proposition n° 62 : Permettre la réalisation de travaux sur des chalets d\'alpage, même en l\'absence de raccordement à la voirie ou aux réseaux d\'eau et d\'électricité, moyennant l\'instauration d\'une servitude administrative, publiée aux hypothèques, interdisant l\'utilisation du chalet l\'hiver. Proposition n° 63 : Dans les communes dépourvues de document d\'urbanisme, autoriser la mise en place du permis de démolir par une délibération du conseil municipal. Proposition n° 64 : Dans le cas des lacs de montagne, prévoir que les documents d\'urbanisme peuvent, après réalisation d\'une étude paysagère (soumise à enquête publique), pour la portion de la rive les concernant, déterminer la zone dans laquelle l\'urbanisation est interdite, en respectant la contrainte d\'une distance moyenne de la rive de 100 ou 300 mètres (selon que le lac concerné est soumis à la loi « montagne » ou à la loi « littoral »). Proposition n° 65 : Prévoir que dans les communes de montagne où la pression urbanistique est faible (cette pression pouvant être évaluée par référence à des critères relatifs à la démographie et aux constructions de résidences secondaires), le conseil municipal et le préfet peuvent autoriser des constructions ou installations en-dehors des parties actuellement urbanisées de la commune. Proposition n° 66 : Modifier le régime des remontées mécaniques sur les points suivants : - remplacer la référence actuelle à un seuil financier, pour le déclenchement de la procédure UTN, par un seuil relatif aux nombres de skieurs concernés ; - alléger le contenu des dossiers destinés à la demande d\'autorisation et de construction ; - préciser que les règles figurant dans la loi « montagne » concernent les seules remontées mécaniques dédiées au ski ou à des loisirs assimilés. Proposition n° 67 : Préciser dans la loi quels équipements sont considérés comme UTN. Proposition n° 68 : Adopter une disposition selon laquelle un SCOT peut prévoir une « enveloppe » de petites UTN. Proposition n° 69 : Alléger la procédure UTN pour les petites opérations, les situations d\'urgence, le remplacement d\'installations de remontées mécaniques et, sous certaines conditions, les petites communes. Proposition n° 70 : Mieux intégrer les commissions UTN aux comités de massif, et rendre obligatoire l\'élaboration par chaque commission de règles générales destinées à guider son action. Proposition n° 71 : Etudier l\'éventualité d\'une expérimentation en matière d\'UTN. Proposition n° 72 : Renforcer le rôle du service d\'études et d\'aménagement touristique en montagne (SEATM), afin de lui permettre d\'apporter aux massifs une véritable assistance technique. Proposition n° 73 : Confier aux comités de massif (dotés d\'une commission d\'urbanisme) l\'élaboration des prescriptions particulières de massif, cette procédure étant mise en oeuvre dans le cadre de la future politique d\'expérimentation en matière de compétence des collectivités locales. Proposition n° 74 : Permettre aux prescriptions de massif, ou à défaut à certains documents d\'urbanisme (SCOT et PLU), après réalisation d\'une étude paysagère et avis conforme du préfet, d\'adapter les règles d\'urbanisme dans certains domaines (définition du hameau, travaux effectués sur les chalets d\'alpage, urbanisation par rapport à la rive des lacs...). RENFORCER LES MOYENS D\'INTERVENTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES Proposition n° 75 : Instaurer une dotation de fonctionnement minimale en faveur des petites communes de montagne. Proposition n° 76 : Permettre aux collectivités locales de montagne de voir leurs contraintes spécifiques prises en compte dans la détermination du montant des dotations de l\'Etat dont elles bénéficient, par un recours accru au critère de potentiel fiscal superficiaire, ou par l\'instauration de critères environnementaux (surface toujours en herbe, superficie occupée par la forêt, importance du pastoralisme...), tout en prenant en compte les « externalités positives » pour les communes voisines (inverse du nombre de résidences secondaires ou de logements touristiques). Proposition n° 77 : Renforcer l\'aide de l\'Etat aux collectivités locales de montagne en matière de collecte et de traitement des déchets. Proposition n° 78 : Reprendre les règles de la circulaire de 1978 relatives au zonage du territoire dans une ou plusieurs normes juridiques opposables aux tiers (loi ou décret). Proposition n° 79 : En ce qui concerne la viabilité hivernale : - ne pas aller, en matière de temps de repos, au-delà de ce qu\'exige l\'application de la directive n° 93/104/CE du 23 novembre 1993 ; - compenser le désengagement de l\'Etat observé dans certains départements par une augmentation équivalente des dotations aux collectivités concernées. Proposition n° 80 : Préciser, par voie de circulaire, l\'éligibilité au FCTVA des investissements réalisés par les collectivités locales sur des immobilisations mises à la disposition de tiers, en particulier : - dans le cas des télécommunications ; - dans celui des chalets d\'alpage et d\'estives utilisés pour la production fromagère (appliquer le droit actuel, qui prévoit que les investissements concernés sont éligibles au FCTVA). Proposition n° 81 : Prévoir l\'instauration d\'une servitude en cas d\'installation de réseaux destinés à permettre la production de neige de culture. Proposition n° 82 : Conforter les moyens techniques des collectivités locales et des opérateurs privés, par le recours à un conseil spécialisé chargé d\'aider ces différentes collectivités à élaborer leur cahier des charges et à analyser les différentes offres. Proposition n° 83 : Supprimer, dans le cas des services publics de remontées mécaniques, la disposition fixant aux contrats une durée maximale de 18 ou 30 ans, afin que le droit commun, défini par la loi « Sapin », s\'applique (possibilité de prolonger une délégation de service public afin de permettre l\'amortissement d\'investissements matériels nécessaires et non prévus au contrat initial). Proposition n° 84 : Adapter le régime des sections communales, afin notamment de favoriser leur « communalisation ». Proposition n° 85 : Modifier l\'article L.332-11-1 du code de l\'urbanisme, afin de permettre aux communes d\'instituer une participation pour une extension de réseau, même non accompagnée de la création d\'une voie ou d\'une extension d\'une voie existante. Proposition n° 86 : Adapter le régime de l\'énergie réservée à l\'ouverture à la concurrence du marché de l\'électricité. Proposition n° 87 : - Etudier la possibilité d\'une révision de la carte PAT, afin de mieux prendre en compte les zones de montagne ; - A défaut, instaurer, en faveur des zones de revitalisation rurale ne bénéficiant pas de la PAT, un régime particulier destiné à leur assurer un niveau d\'aide analogue à celui de la PAT. Proposition n° 88 : Envisager le regroupement dans un fonds spécialisé de l\'ensemble des crédits du FNADT en faveur des massifs. Proposition n° 89 : Améliorer la coordination des CPER et des conventions interrégionales de massif. Proposition n° 90 : Etudier la possibilité de régionaliser, à titre expérimental, les crédits communautaires utilisés en faveur de la montagne. Proposition n° 91 : Créer de véritables « zones franches de montagne », en s\'inspirant éventuellement de la « zone franche de Corse », pour les zones de montagne souffrant des plus graves handicaps. Proposition n° 92 : Etudier l\'opportunité de rattacher le Morvan au Massif central. Proposition n° 93 : Instaurer une présidence du comité de massif par le seul président de la commission permanente. Proposition n° 94 : Améliorer la composition et le mode de fonctionnement des comités de massif, et leur donner davantage de moyens humains et financiers. Proposition n° 95 : Afin de réconcilier les régions et les comités de massif, faire de ces derniers des instances décentralisées de réflexion, de proposition et de coordination entre régions se partageant un même massif. Proposition n° 96 : Transformer les comités de massif en syndicats mixtes ouverts. Proposition n° 97 : Déconcentrer davantage les pouvoirs de l\'administration au niveau des commissariats de massif, notamment en matière de gestion des crédits, et accroître les moyens (en particulier humains) des commissariats de massif. Proposition n° 98 : Obtenir la reconnaissance du handicap de la montagne au niveau communautaire. AVANT-PROPOS En décrétant cette année 2002, « Année des Montagnes du Monde », l\'Assemblée générale des Nations Unies a utilement pointé le caractère d\'extrême diversité des terres d\'altitude, au moment où les pratiques simplificatrices de la communication contemporaine soumettent la montagne à quelques clichés réducteurs, à l\'usage de nos sociétés urbaines : « espace de détente et loisirs », « poumon de verdure et d\'oxygène », « cimes enneigées équipées pour les sports d\'hiver... ». En effet, la réalité est tout autre, et la montagne est faite de diversité, presqu\'à l\'infini : - diversité des montagnes du monde, que la consistance géologique, comme les latitudes, les climats, et les hommes qui les habitent rendent si différentes. - diversité des montagnes de France : « humides » au Nord, « sèches » au Sud ; ici, siège d\'une monoactivité agricole, là riche d\'une pluriactivité agro-industrielle ou agro-touristique ; montagnes encore et toujours frappées par l\'exode quand d\'autres sont soumises aux flux importants des populations saisonnières ou des véhicules en transit ; haut-plateaux herbageux si différents des aiguilles surplombant névés et glaciers ; montagnes métropolitaines, ou massifs insulaires de la Méditerranée, de l\'Océan Indien ou de la Mer des Caraïbes. Et pourtant, malgré cette extraordinaire et si riche diversité, les montagnes de France, qui couvrent 28 % de son territoire, où vit 13,5 % de la population nationale, offrent de très nombreux points communs, qui sont autant de questions posées aux responsables politiques. * * * * Une agriculture, activité traditionnelle, dont le niveau de soutien public est inférieur à celui de la moyenne nationale, réalité en totale contradiction avec les principes de légitime compensation du « handicap montagne » affirmés depuis plusieurs décennies par la législation française ; * Une industrie, souvent fortement enracinée, qui revendique de continuer à vivre dans une montagne incapable de lever, seule, les handicaps de l\'enclavement, et qui ressent un fort déficit de solidarité nationale sur cette question essentielle ; * Un tourisme, dont l\'essor est freiné par une absence de politiques fiscales et sociales adaptées à la saisonnalité, et par le manque récurrent de réponse au besoin de créer un véritable régime de la pluriactivité ; * La quasi inexistence de politiques nationales et européennes pour régler la question de la traversée des massifs frontaliers ou proches des pays voisins : l\'Allemagne, la Suisse, l\'Italie, l\'Espagne ; cette situation infligeant aux populations sédentaires les nuisances causées par une forte croissance du trafic routier et ne laissant entrevoir à échéance raisonnable aucune perspective de solutions alternatives susceptibles d\'apaiser les tensions locales ; * Des initiatives environnementalistes, telles la réintégration de grands prédateurs, prises sans concertation avec les responsables locaux et au mépris des activités ancestrales, comme le pastoralisme, avivent le sentiment que les « grandes » décisions concernant la montagne relèvent d\'un processus centralisé, voire « colonial » ; * La lente, mais apparemment inéluctable disparition de services : publics, médicaux, et privés, disparition qui dans beaucoup de massifs entraîne puis accroît la dévitalisation démographique. * * * Telles sont, sans forcer le trait, quelques manifestations du sentiment très largement ressenti et exprimé par les habitants des montagnes, en charge de responsabilités socioprofessionnelles, électives, et même associatives. Cette réalité ne devrait pas manquer de surprendre et d\'interroger tous ceux qui, avec les Parlementaires ayant voté à l\'unanimité la loi dite « montagne » du 9 janvier 1985, avaient mis tant d\'espoirs dans cette loi d\'auto-développement, de compensation des handicaps, d\'équilibre entre développement et protection de la nature, en un mot, dans cette loi d\'authentique décentralisation. La déception aujourd\'hui est à la mesure de l\'oubli dans lequel est tombée cette loi, s\'agissant de la plupart de ses dispositions, à l\'exception de l\'une d\'entre elles, mais de taille celle-là : l\'urbanisme. En effet, la référence à la loi « montagne » est quotidiennement faite pour justifier l\'application stricte par l\'Etat, de quelques principes organisant l\'inconstructibilité des terres de montagne (avec au besoin, l\'aide en renfort du tribunal administratif), si bien que cette loi est devenue la pomme de discorde permanente entre tant d\'élus locaux et de représentants de l\'Etat, Préfets et DDE. Devenue le chiffon rouge des collectivités territoriales, propriétaires et autres acteurs de l\'aménagement, la loi « montagne » n\'a pu, dans le même temps, faire reconnaître les mérites et atouts que le législateur avait placés en elle : parce que tant de décrets d\'application ne sont jamais parus ; parce qu\'en peu de temps, le Fonds interministériel d\'aménagement de la montagne (FIAM) a fondu comme neige au soleil ; parce que le louable principe de maîtrise par les collectivités territoriales de leur développement est contrecarré par l\'application du droit de la concurrence aux délégations des services publics de transports par remontées mécaniques ; parce que l\'équilibre voulu entre les objectifs de développement et de protection de la nature a été rompu au profit du second ; parce que les comités de massifs ont échoué sur les récifs du centralisme renaissant et du découpage régional. * * * Ce rapide état des lieux, qui explique pourquoi, ainsi qu\'on l\'a dit, la loi « montagne » est tombée dans l\'oubli, traduit aussi une crise, dont il n\'est pas exagéré de dire qu\'elle est profonde, et que, pour concerner la montagne, elle n\'en constitue pas moins une question prioritaire à l\'échelle du territoire national dans son ensemble. Autrement dit, si les montagnards sont intéressés au premier chef par l\'avenir de la montagne, ce défi concerne aussi, à l\'évidence, la société française tout entière. Ce défi doit également intégrer l\'évolution annoncée des politiques communautaires. Les inflexions ou les réaménagements en profondeur de la politique des fonds structurels ou de la politique agricole commune auront des répercussions significatives sur l\'aménagement et le développement des zones de montagne. L\'avenir des territoires de montagne en Europe passe par la reconnaissance, au niveau communautaire, de leurs spécificités et la définition d\'une politique transversale adaptée. C\'est pourquoi, conformément à sa vocation constitutionnelle de représentant des collectivités territoriales de la République, le Sénat a jugé nécessaire de provoquer réflexions et débats sur la situation de la montagne française. A cet effet, la Haute Assemblée a institué en février 2002 une mission commune d\'information, composée de sénateurs issus de tous les massifs montagneux, et représentants des différentes sensibilités politiques. La mission s\'est mise au travail, sans retard, afin de déposer ses conclusions avant la fin de cette année internationale des montagnes. D\'avril à septembre, elle a conduit au Sénat près de 50 auditions au cours desquelles elle a entendu quelque 80 spécialistes et acteurs de la vie en montagne. Elle s\'est également appuyée sur les travaux très complets de l\'instance d\'évaluation de la politique de la montagne1(*) Elle a, en outre, visité les massifs de la France métropolitaine. Au cours de ces déplacements, environ 40 auditions ont été menées, réunissant au total quelque 400 élus locaux, professionnels, responsables des services publics et milieux associatifs. Elle a naturellement bénéficié, avec notre collègue Pierre Jarlier, secrétaire général de l\'Association des élus de la montagne, d\'un relais privilégié pour connaître la position des élus locaux. Regrettant que les délais impartis ne lui aient pas laissé le temps de se rendre en Corse et dans les DOM, la mission a néanmoins longuement auditionné à Paris, les représentants des montagnes françaises insulaires. Enfin, elle s\'est rendue à Bruxelles pour échanger avec les responsables des cinq directions concernées par les « politiques-montagne ». La mission remercie l\'ensemble des personnes qui ont bien voulu apporter leurs contributions et permis ainsi de nourrir de façon très « vivante » l\'information sur les réalités actuelles de la montagne et l\'analyse entreprise par le présent rapport. INTRODUCTION : DIVERSITÉ ET SPÉCIFICITÉS DES ZONES DE MONTAGNE La situation économique des zones de montagne présente une forte hétérogénéité. Avant de décrire cette hétérogénéité, il convient de souligner que cette situation économique est également mal connue. Ainsi que l\'a affirmé M. François Philizot, directeur adjoint au délégué de la DATAR, lors de son audition par la mission commune d\'information : « Il n\'existe pas aujourd\'hui d\'approche statistique coordonnée, cohérente sur les espaces de montagne. Il y a certes une géographie des zones de montagne, mais notre appareil statistique ne contient aujourd\'hui aucun regroupement systématique sur la montagne. L\'INSEE ne sort notamment aucune statistique identifiée autour de l\'idée de montagne : ses statistiques respectent le découpage traditionnel des départements, des régions, par zones d\'emploi ». La dernière étude réalisée sur le sujet, le rapport du Commissariat général du Plan et du Conseil national de l\'évaluation sur la politique de la montagne2(*), date de 1999, et ses données les plus récentes concernent l\'année 1996. Les chiffres indiqués dans les développements qui suivent proviennent de cette étude (les principaux d\'entre eux sont synthétisés dans le tableau ci-après), mais les analyses sont celles de votre mission d\'information. Zone montagne Espace de référence Total France Alpes du Nord Alpes du Sud Corse Jura Massif central Pyrénées Vosges Superficie (km2) 124.000 396.300 543.966 17.684 17.680 8.013 6.375 52.871 15.314 4.364 Dont SAU % 32,9 53,4 52,6 24,4 16,0 13,5 37,3 49,2 18,8 16,1 Dont forêt % 33,3 25,2 23,5 32,8 34,9 40,6 41,6 29 31,3 62,9 Dont alpages % 8,8 2,4 2,3 9,0 18,7 16,1 3,3 1,6 22,9 0,6 Population (1990) (milliers hab.) 4.338 22.941 56.562 959 303 112 298 1.931 331 329 Densité (hab./km2) 34,9 21,6 104,1 54,2 17,2 13,9 46,8 36,5 21,6 75,5 Evolution annuelle 1982/1990 + 0,35 + 0,65 + 0,51 + 1,41 + 1,52 + 0,52 + 0,90 - 0,21 - 0,06 - 0,39 Dont solde migratoire + 0,30 + 0,48 + 0,10 + 0,92 + 1,49 + 0,86 + 0,38 - 0,06 + 0,42 - 0,53 Dont solde naturel + 0,04 + 0,17 + 0,41 + 0,52 + 0,03 - 0,36 + 0,53 - 0,15 - 0,48 + 0,13 % de 20 ans 24,9 27,1 26,5 27,4 23,6 21,2 28,3 24,0 20,7 26,1 % + de 60 ans 20,0 22,0 23,6 17,5 24,8 28,1 18,6 26,1 30,7 21,8 Part en 1990 des personnes venues depuis 1982 d\'un autre département (%) 13,0 15,0 16,2 15,9 20,4 19,1 14,6 10,5 15,0 7,5 Part parmi les actifs (%) 13,5 15,2 17,4 16,2 20,9 18,9 16,2 10,6 15,2 7,7 Part parmi les retraités (%) 7,3 7,5 7,7 6,8 13,2 18,3 4,4 6,2 10,2 3,8 Taux d\'activité (1990) (%) 42,9 42,5 44,4 46,4 43,1 36,1 46,8 41,3 40,4 43,5 Secteur primaire (%) 9,7 11,6 5,7 4,3 8,4 12,5 6,7 13,5 13,3 3,9 Secteur secondaire (%) 33,4 34,6 30,1 35,8 22,0 21,1 49,2 32,6 26,0 48,4 Secteur tertiaire (%) 58,3 53,8 64,2 59,9 69,6 63,5 44,1 53,9 60,8 47,7 Taux de chômage 1990 (%) 9,2 10,4 10,9 6,7 9,8 14,1 5,8 10,3 12,3 9,4 Evolution actifs occupés 1982/1990 (%) + 2,3 + 4,0 + 3,1 + 14,0 + 10,4 + 3,0 + 10,1 - 4,0 - 4,1 - 2,2 Variation des emplois existant sur place 1982-1990 (%) 0 0 + 3,1 + 12,4 + 6,1 - 2,1 + 3,8 - 5,1 - 3,8 - 8,7 Evolution emplois salariés secteur privé 1989/1994 Créativité d\'établissements (étab. Créés ou repris dans la période 1980/1988 p 1000 hab.) - 1,2 nd + 3,1 + 4,9 + 6,5 nd - 2,9 - 1,5 + 6,2 - 0,2 8,5 6,7 7,0 13,0 11,3 11,1 7,3 6,4 9,1 6,5 Capacité d\'accueil touristique (1000 lits) 4.815,7 10.415,2 19.043 1.328,1 732,9 299,3 173,0 1.354,6 739,2 188,6 Dont résidence secondaire (%) 48,9 55,4 54,0 41,8 52,9 41,0 52,0 59,4 41,7 46,2 Emplois hôtellerie + restauration (% du total en 1990) 4,6 3,0 3,4 5,9 7,3 7,2 3,9 3,2 6,4 4,0 Evolution 1989/1994 (%) + 17,6 + 13,0 + 15,1 + 20,7 + 10,2 nd + 3,8 + 14,0 - 31,6 + 15,2 Logements construits 1982/1990 (%) 15,8 14,2 12,8 23,5 18,9 17,9 13,9 11,4 16,6 11,1 Enclavement de 1er niveau 1988 (par rapport à 7 services de base (km) 2,5 1,7 1,7 1,9 3,0 3,9 2,2 2,5 2,5 1,0 Evolution de l\'enclavement 1980/1988 (%) 9,6 17,2 14,7 7,1 1,2 - 7,7 8,0 17,5 10,9 10,5 Enclavement de 2e niveau 1988 (par rapport à un ensemble de services élaborés) (km) 17,9 11,9 11,8 13,5 23,2 25,9 12,0 18,3 17,5 9,1 Evolution de l\'enclavement 1980/1988 (%) - 4,9 - 3,2 - 3,9 - 5,3 - 9,7 - 5,9 - 0,5 - 3,8 - 4,0 - 1,2 Revenu imposable moyen 1990 (euros) 10565 11281 12653 12562 11159 9406 11845 9498 9665 11007 % de communes sans école primaire 9 7 6 7 10 22 13 7 19 7 Source : Conseil national de l\'évaluation, Commissariat général du Plan, La politique de la montagne, rapport d\'évaluation, 1999. Cadrage socio-économique et démographique des zones de montagne (zonage agricole-1996-toutes communes) A. UNE FORTE HÉTÉROGÉNÉITÉ ENTRE MASSIFS ET AU SEIN DES MASSIFS La forte hétérogénéité des zones de montagne se manifeste tout d\'abord entre les différents massifs. La situation économique des massifs peut être évaluée par une comparaison des revenus imposables moyens. Cet indicateur semble d\'autant plus pertinent que, selon la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne : « la politique de la montagne a pour finalité de permettre aux populations locales et à leurs élus (...) d\'établir (...) la parité des revenus et des conditions de vie entre la montagne et les autres régions ». Selon le critère du revenu par habitant, il est possible d\'établir la typologie suivante. 1. Deux zones bénéficiant d\'atouts économiques diversifiés : les Alpes du Nord et le Jura Tout d\'abord, l\'ensemble Alpes du Nord3(*)-Jura est plus développé que la moyenne des zones rurales hors montagne, avec des revenus imposables moyens de 12.500 euros et 12.000 euros respectivement en 1990 (contre 11.000 euros pour les zones rurales hors montagne). Ce sont les massifs dont le taux de chômage est le plus faible (respectivement 6,7 % et 5,8 % en 1990, pour une moyenne de 10,4 % dans les zones rurales hors montagne). Ils figurent également (avec les Alpes du Sud) parmi les plus dynamiques sur le plan démographique (+1,4 % et +0,9 % respectivement de 1982 à 1990). a) Les Alpes du Nord : tourisme et villes moyennes dynamiques L\'économie des Alpes du Nord est caractérisée par la place très importante occupée par le tourisme. Ainsi, en 1990 la restauration et l\'hôtellerie employaient 5,9 % de la population active dans les Alpes du Nord (la moyenne de la zone montagne française étant de 4,6 %). Les emplois indirects sont eux aussi importants, en particulier dans le domaine du tertiaire marchand. Le tourisme joue également un rôle déterminant dans la nature des activités industrielles. En effet, trois départements concentrent l\'essentiel de celles liées aux sports d\'hiver et à l\'alpinisme : la Haute-Savoie (équipements de ski, de matériel d\'alpinisme et de vêtements de montagne), la Savoie (dameuses et remontées mécaniques) et l\'Isère (skis et remontées mécaniques)4(*). Il convient cependant de souligner que la part de la main-d\'oeuvre employée par le secteur secondaire (35,8 % en 1990) est dans les Alpes du Nord analogue à celle observée dans l\'ensemble des zones de montagne (33,4 % en 1990). Le tourisme semble donc influencer la nature de l\'activité industrielle, plus que son poids en terme de main-d\'oeuvre employée. Le massif des Alpes du Nord bénéficie également d\'un réseau de petites villes dans les basses vallées. Les villes sont en effet, par nature, le lieu privilégié de l\'activité économique, et leur situation économique est généralement meilleure que celle des zones rurales. b) Le Jura : une forte présence industrielle Le tourisme joue en revanche un faible rôle dans le cas du Jura. Ainsi, la restauration et l\'hôtellerie n\'y employaient en 1990 que 3,9 % de la population active, ce qui en faisait, avec le Massif central, le massif où ces activités étaient les moins développées. L\'économie du Jura repose en fait sur l\'activité industrielle. Il s\'agit du massif le plus industrialisé : en 1990, 49,2 % de la population active était employée dans le secteur secondaire. L\'industrie, diffuse, est localisée dans sa partie sud. 2. Les autres massifs connaissent des difficultés économiques La situation des autres massifs est en revanche moins favorable que celle de la moyenne des zones rurales hors montagne. a) Des massifs dans la moyenne des zones de montagne : Vosges, Alpes du Sud Tout d\'abord, jouxtant au nord et au sud l\'ensemble Alpes du Nord-Jura, on trouve des massifs moins développés que la moyenne des zones rurales hors montagne, mais qui s\'inscriront en 1996 dans la moyenne des zones de montagne : Vosges, Alpes du Sud (revenu imposable par habitant de 11.000 euros, contre une moyenne de 10.500 euros). Ces massifs ont un taux de chômage inférieur à la moyenne des zones rurales hors montagne (respectivement 9,4 % et 9,8 % en 1990, contre 10,4 % en moyenne). (1) Les Vosges : une région industrielle en mutation Les Vosges sont dans leur quasi-totalité une région industrielle en mutation, utilisant une main-d\'oeuvre souvent peu qualifiée. Ainsi, le secteur secondaire y employait en 1990 48,4 % de la population active, ce qui en faisait le massif le plus industrialisé après le Jura. Ce massif est celui qui se dépeuple le plus rapidement (diminution de la population de 0,4 % de 1982 à 1990, en raison d\'un solde migratoire fortement négatif). (2) Les Alpes du Sud : un environnement d\'excellence Les Alpes du Sud sont quant à elles organisées en trois zones concentriques : la haute montagne est une zone de « grand tourisme », sa périphérie, désertifiée et enclavée, s\'efforce de développer une activité analogue, et les Préalpes sont une zone rurale démographiquement attractive et comprenant 25 % d\'agriculteurs (contre 11,6 % dans l\'ensemble des zones de montagne). b) Les Pyrénées : le massif le moins homogène Les Pyrénées sont le massif le moins homogène : la haute montagne est une zone de grand tourisme, sa partie orientale bénéficie d\'une activité touristique moins développée et sa partie occidentale est constituée de régions agricoles en difficulté. Ainsi, les chiffres moyens ne reflètent que très partiellement la réalité de ce massif (revenu imposable de 10.000 euros en 1996 et taux de chômage de 12,3 % en 1990, stagnation de la population). c) Des massifs moins favorisés que la moyenne des zones de montagne : Massif central, Corse Les autres massifs sont moins développés que la moyenne des zones de montagne : Massif central et Corse (revenu imposable de 9.500 euros par habitant en 1990). Ce sont ceux dont le taux de chômage est le plus élevé (respectivement 10,3 % et 14,1 % en 1990, contre 9,2 % pour l\'ensemble des zones de montagne). De 1982 à 1990 la population a diminué dans le cas du Massif central (- 0,21 %) et augmenté dans celui de la Corse (+ 0,52 %). Cependant le Massif central est (avec les Vosges) le seul massif à avoir un solde migratoire négatif (- 0,06 %). (1) Le Massif central : des régions agricoles en difficulté Le Massif central est presque exclusivement constitué de régions agricoles en difficulté, souvent très enclavées. (2) La Corse : une opposition entre centre et périphérie La Corse quant à elle est composée d\'une partie centrale agricole en crise, entourée de zones urbaines et zones touristiques. 3. Une forte hétérogénéité entre cantons A un niveau plus microéconomique, il convient de souligner l\'existence d\'une forte hétérogénéité entre cantons. Le rapport du Commissariat général du Plan et du Conseil national de l\'évaluation sur la politique de la montagne5(*) propose à cet égard une typologie intéressante, synthétisée dans le tableau ci-après. TYPOLOGIE DES CANTONS DE MONTAGNE SELON LE RAPPORT D\'ÉVALUATION DE LA POLITIQUE DE LA MONTAGNE (1999) Désignation Principales caractéristiques Principales localisations Grand tourisme confirmé Importance de la capacité d\'accueil touristique Fortes proportions d\'emplois dans l\'hôtellerie et la restauration Alpes du NE Une partie des Pyrénées Cantons les plus touristiques du Sud de la Corse Développement diversifié Groupe rural « classique » (environ 30 habitants/km², 25 % d\'agriculteurs) Attractivité démographique Principalement les Préalpes du Sud Economie et démographie fragiles Groupe rural « classique » (environ 30 habitants/km², 25 % d\'agriculteurs). Population en déclin Essentiellement le Massif central Forte influence urbaine 164 habitants/km², population jeune, emploi et population en forte croissance (+2 % et +12,8 % par an), 1/3 d\'industrie, 2/3 de tertiaire, revenus supérieurs à la moyenne nationale, tourisme peu important Cantons comportant les principales petites villes qui animent les massifs ou situés dans les basses vallées (notamment dans les Alpes du Nord). Cantons désertifiés en conversion touristique Faible densité de population (11 habitants/km²). Stagnation démographique à cause de l\'âge élevé de la population Fort enclavement. Importance du tourisme, moindre cependant que dans le cas du 1er groupe et incapable d\'entraîner l\'ensemble de l\'économie. Etage agro-forestier des montagnes sèches, où les deux saisons touristiques sont souvent compromises, et le handicap de la pente très difficile pour l\'agriculture. Exemples : certaines régions du Massif central (rebord du Vivarais et des Cévennes, cantons isolés du Limousin et de l\'Auvergne), régions des Alpes du Sud périphériques des régions de grand tourisme, chaînes pré-pyrénéennes. Industrie en difficulté Forte place de l\'emploi industriel (main-d\'oeuvre faiblement qualifiée, recul sensible de l\'emploi non compensé par le secteur tertiaire). Enclavement moindre que la moyenne nationale. Faible développement du tourisme. Quasi-totalité du massif vosgien, sud du Jura, Bugey, basse vallée de la Maurienne, monts du Beaujolais, vallée de la Dore, sites industriels anciens du Massif central, de la vallée de l\'Ariège et des cantons du piémont pyrénéen. Très agricoles à très forts handicaps Extrême spécialisation agricole (44 % de l\'emploi). Recul de l\'emploi dans tous les secteurs. Territoires fortement enclavés : Massif central, Corse centrale, 7 cantons des Pyrénées. Source : Conseil national de l\'évaluation, Commissariat général du Plan, La politique de la montagne, rapport d\'évaluation, 1999. B. UN DOUBLE ENSEIGNEMENT La mission commune d\'information estime qu\'il est possible de tirer de cette hétérogénéité un double enseignement. 1. Quelles sont les différences entre la montagne et les autres zones rurales ? Tout d\'abord, la montagne présente par rapport aux autres zones rurales de fortes spécificités. a) De fortes spécificités La loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne6(*) fonde la délimitation des zones de montagne sur l\'existence de fortes pentes et de conditions climatiques difficiles. Ce constat ne doit pas dissimuler le fait que les conditions naturelles et historiques varient fortement d\'une montagne à une autre. b) Des problématiques parfois non spécifiques à la montagne Cependant, certaines des difficultés rencontrées par les zones de montagnes peuvent également se rencontrer sur le reste du territoire. (1) Des zones rurales en difficulté Tout d\'abord, certains cantons de montagne sont avant tout des cantons ruraux en difficulté. Ainsi, de nombreux cantons de montagne ont une population active constituée pour 25 % d\'agriculteurs. Ces cantons sont dans une situation difficile. Tous ont un faible revenu par habitant. Parmi eux, certains sont démographiquement attractifs (ce qui concerne principalement les Préalpes du Sud), d\'autres en déclin démographique (ce qui est essentiellement le cas de nombreux cantons du Massif central). Malgré certaines spécificités montagnardes (comme le type d\'activité agricole), ces cantons présentent de fortes similitudes avec d\'autres zones rurales en difficulté. (2) Des zones industrielles en crise De même, il existe en montagne des zones industrielles en crise, telles qu\'on peut en rencontrer ailleurs sur le territoire national. Tel est le cas de la quasi-totalité du massif vosgien, du sud du Jura, du Bugey, de la basse vallée de la Maurienne, des monts du Beaujolais, de la vallée de la Dore, des sites industriels anciens du Massif central, de la vallée de l\'Ariège et des cantons du piémont pyrénéen. 2. Comment expliquer les écarts de développement entre zones de montagne ? Plusieurs facteurs permettent d\'expliquer les écarts de développement entre zones de montagne. a) Les zones au revenu par habitant le plus faible sont celles qui emploient la plus forte proportion d\'agriculteurs Tout d\'abord, un élément essentiel semble être l\'importance du secteur primaire (c\'est-à-dire agricole) dans les massifs les moins développés. En effet, alors que celui-ci représentait, en 1990, 9,7 % de la population active dans les zones de montagne (soit légèrement moins que dans les zones rurales hors montagne, où ce taux est de 11,6 %), il était de 12,5 % en Corse, 13,3 % dans les Pyrénées et 13,5 % dans le Massif central (pour un taux compris entre 3,9 % et 8,4 % pour les autres régions). b) Les principaux facteurs d\'inégalité de développement industriel entre les zones de montagne : l\'enclavement et la faible densité de population ? Ensuite, la faible densité de population et son corollaire, l\'enclavement, constituent peut-être le principal facteur explicatif des écarts de développement industriel (mais pas de revenu par habitant) entre zones de montagne. Contrairement à ce que l\'on pourrait attendre, la densité de population ne semble pas empêcher un revenu par habitant élevé. D\'une manière générale, la corrélation entre densité de population et revenu imposable par habitant est faible. Ainsi, les Vosges et les Alpes du Sud avaient en 1990 un revenu imposable moyen analogue (de l\'ordre de 11.000 euros par an), alors que les Vosges étaient, de loin, le département le plus densément peuplé (75,5 habitants au km²), et que seule la Corse avait une densité de population plus faible que les Alpes du Sud (17,2 habitants au km²). En fait, l\'enclavement semble principalement gêner la constitution d\'industries, en réduisant les possibilités d\'économies d\'échelle par la réunion d\'une main-d\'oeuvre importante sur un même lieu de production. Ainsi, les zones à faible densité de population sont victimes d\'un cercle vicieux : le faible développement industriel renforce la faible densité de population, ce qui incite les industries à s\'installer ailleurs. La faible densité démographique est à son tour génératrice d\'enclavement, faute d\'infrastructures de transports appropriées. Ainsi s\'instaure un cercle vicieux, l\'enclavement suscité par la faible densité démographique aggravant cette dernière. Le graphique ci-après permet de mettre en évidence ce phénomène. Ainsi, la Corse et les Alpes du Sud, massifs dont l\'industrie est la moins développée, sont aussi les massifs les moins densément peuplés. D\'autres phénomènes entrent cependant en jeu : ainsi, le développement industriel du Jura est identique à celui des Vosges, alors que sa densité de population est nettement inférieure. Ces écarts par rapport à la tendance ne remettent cependant pas en cause la pertinence de l\'analyse. DENSITÉ DE POPULATION (1990) ET MAIN-D\'OEUVRE EMPLOYÉE DANS LE SECTEUR SECONDAIRE (1996) Densité de population (hab./ km²) Main-d\'oeuvre employée dans le secteur secondaire (en % de la population active) Source : données figurant dans le rapport du Conseil national de l\'évaluation, Commissariat général du Plan, La politique de la montagne, rapport d\'évaluation, 1999. La faible densité de population peut cependant se révéler dramatique dans le cas de zones dépourvues d\'activité de services, en particulier touristique. Ainsi, elle constitue l\'une des causes essentielles de l\'existence de zones que le rapport du Conseil national de l\'évaluation et le Commissariat général du plan qualifie de « très agricoles à très forts handicaps ». Ces cantons, caractérisés par une extrême spécialisation agricole (44 % de l\'emploi) et un recul de l\'emploi dans tous les secteurs, sont essentiellement ceux du Massif central et de la Corse centrale, ainsi que quelques cantons des Pyrénées (principalement occidentales). c) Le principal facteur de développement du secteur tertiaire : le tourisme Le tourisme s\'affirme comme le principal facteur de développement du secteur tertiaire, comme l\'indique le graphique ci-après. Emplois de l\'hôtellerie et de la restauration et emplois du secteur tertiaire (1996) (en % de la population active) Hôtellerie+restauration Secteur tertiaire Source : Conseil national de l\'évaluation, Commissariat général du Plan, La politique de la montagne, rapport d\'évaluation, 1999. Ce phénomène s\'explique notamment par le fait que les emplois de l\'hôtellerie et de la restauration suscitent le développement d\'autres services. Il convient de distinguer les zones de grand tourisme confirmé (Alpes du nord-est, une partie des Pyrénées, cantons les plus touristiques du sud de la Corse) de celles s\'efforçant de développer leur activité touristique (certaines régions du Massif central -rebord du Vivarais et des Cévennes, cantons isolés du Limousin et de l\'Auvergne-, régions des Alpes du Sud périphériques des régions de grand tourisme, chaînes pré-pyrénéennes). PREMIÈRE PARTIE - MAÎTRISER, METTRE EN VALEUR ET PROTÉGER LES ÉLÉMENTS DU PATRIMOINE NATUREL La montagne figure parmi les grandes richesses patrimoniales de la France. Elle est le symbole même d\'une nature riche et préservée et la diversité de ses ressources naturelles, de la faune et de la flore constitue un atout inestimable. Les éléments physiques qui la caractérisent, comme l\'altitude, la pente et le climat se déclinent de manière très diversifiée d\'un massif à l\'autre. D\'où la variété des paysages, façonnés de longue date par l\'activité humaine et la richesse du patrimoine naturel montagnard. Mais cette nature est également soumise à une forte pression humaine qui la rend écologiquement vulnérable. Il importe de protéger de façon dynamique les espaces et les milieux naturels, de chercher à valoriser les ressources naturelles, tout en prenant en compte les risques naturels qui sont plus fréquents en zone de montagne qu\'ailleurs. I. PROMOUVOIR UNE DÉMARCHE CONTRACTUELLE ET CONCERTÉE POUR PRÉSERVER LE PATRIMOINE NATUREL Comme l\'ont souligné de nombreux interlocuteurs, l\'exceptionnelle biodiversité des zones de montagne fait l\'objet d\'une large protection, ce qui localement entraîne des superpositions de zonages et de réglementations parfois préjudiciables à la lisibilité des objectifs poursuivis. Dans ces conditions, la tentation d\'accroître encore la réglementation des activités ou de recourir à des outils de protection pour gérer les milieux peut constituer une atteinte à l\'esprit de liberté et de responsabilité propre à la montagne. Il faut, à l\'inverse, encourager les démarches contractuelles de cogestion sur des objectifs précis. A. UNE RICHESSE PATRIMONIALE LARGEMENT RECONNUE 1. Une protection étendue de l\'espace montagnard L\'article 1er de la loi « montagne » précise que la politique de la montagne assure : « la protection des équilibres biologiques et écologiques, la préservation des sites et des paysages, la réhabilitation du bâti existant et la promotion du patrimoine naturel ». Les diverses législations de protection qui ont structuré le dispositif de protection des milieux naturels et des paysages ont été largement appliquées en zone de montagne. Il s\'agit notamment de la loi n° 60-708 du 22 juillet 1960 créant les parcs nationaux, de la loi n° 93-24 sur la protection et la mise en valeur des paysages, sur les parcs naturels régionaux, et de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature créant les réserves naturelles. Ainsi on estime qu\'en 1996, 89 % de la surface du territoire couverte par une protection forte (parcs nationaux, réserve intégrale et réserve naturelle) se situe en zone de montagne. 30 % de la superficie montagnarde est protégée contre 12 % en moyenne nationale et 20 % des communes de montagne sont concernées par un parc national ou régional, une réserve naturelle volontaire, un arrêté de protection de biotope ou une forêt de protection. Il faut noter également que la mise en oeuvre de la procédure d\'autorisation des unités touristiques nouvelles (UTN) a entraîné, le plus souvent en compensation des autorisations accordées, l\'intervention de 91 mesures de protection, dont 21 réserves naturelles, 53 classements de sites, 11 classements en forêt de protection et 7 arrêtés de biotope. PATRIMOINE NATUREL DE LA MONTAGNE (TABLEAU COMPARATIF ENTRE MONTAGNE, PLAINE ET LITTORAL) Ensemble du territoire Zone de montagne Zone de plaine Zone littorale Superficie 5 433 965 km2 118 971 km2 21,9 % 417 983 km2 76,8 % 7 011 km2 1,3 % Végétaux (1) 434 espèces 196 espèces 45,2 % 227 espèces 52,3 % 79 espèces 18,2 % Mammifères (2) 53 espèces 46 espèces 86,8 % 43 espèces 81,1 % - - (1) Espèces végétales protégées (arrêté du 20 janvier 1982 modifié) une espèce peut être présente dans plusieurs zones) (2) Mammifères protégés (arrêté du 17 avril 1981 modifié) (une espèce peut être présente dans plusieurs zones). Source : L\'évaluation de la politique de la montagne 1999. 2. La multiplicité des outils de protection recensés en montagne a) Les parcs nationaux Sur les sept parcs nationaux existants, cinq intéressent le patrimoine montagnard et ont été mis en place entre 1963 et 1989. Quatre sont situés en haute montagne (Vanoise, Ecrins, Mercantour, Pyrénées) alors que le Parc des Cévennes est situé en moyenne montagne et abrite une activité économique traditionnelle. L\'ensemble des zones centrales -qui bénéficient de la protection la plus forte- représente moins de 1 % du territoire national et moins de 4 % du territoire montagnard. Pour les zones périphériques, les pourcentages sont respectivement de moins de 2 % et moins de 8 %. La population concernée par les parcs nationaux s\'élève à 200.000 habitants, soit 0,4 % de la population totale. b) Les réserves naturelles Sur les 150 réserves naturelles installées sur le territoire, qui concernent 536.210 hectares, 40 se situent en zone de montagne (80.713 hectares protégés). Cet outil tend à la préservation de la reconstitution de populations d\'espèces animales ou végétales ou d\'habitats en voie de disparition, de formations géologiques, géomorphologiques ou spéléologiques remarquables. Le choix des nouvelles réserves repose sur les inventaires scientifiques réalisés. Les réserves sont l\'un des instruments permettant à la France de satisfaire à ses obligations communautaires ou résultant d\'une convention internationale. Le régime des réserves naturelles vient d\'être modifié dans le sens d\'une plus grande décentralisation par les dispositions de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 sur le statut de la Corse et la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Le nouveau dispositif s\'articule désormais autour de trois régimes distincts : - les réserves naturelles nationales, dont le classement relève de la compétence de l\'Etat, la gestion étant confiée par voie de convention, à un organisme gestionnaire. Un comité consultatif présidé par le préfet, composé de représentants des propriétaires, des collectivités territoriales, des administrations concernées ainsi que des associations de protection de la nature donne son avis sur la gestion et le fonctionnement de la réserve. Le financement de la gestion des réserves est essentiellement assuré par l\'Etat, les collectivités territoriales participant dans certains cas, notamment aux dépenses d\'investissement ; - les réserves naturelles régionales ; depuis la loi du 27 février 2002 précitée, les régions peuvent classer en réserve naturelle régionale, à la demande des propriétaires ou à leur initiative, des espaces présentant un intérêt pour la protection des milieux ; - les réserves naturelles corses relèvent désormais de la compétence de la collectivité territoriale de Corse. c) Les parcs naturels régionaux Créés en 1967 à l\'initiative de la DATAR, les parcs naturels régionaux, au nombre de 40, concernent près de 12 % du territoire national et comptent environ 3,5 millions d\'habitants. Parmi eux, 19 sont concernés par des massifs et sont situés principalement en moyenne montagne, à l\'exception du parc du Queyras. Sur les parcs en projets, deux sont situés en territoire de montagne : les Pyrénées catalanes et le Territoire des Mille-vaches en Limousin. d) Les arrêtés de protection de biotopes L\'arrêté de protection de biotope, mis en place par la circulaire du 27 juillet 1990 relative à la protection des biotopes nécessaires aux espèces vivant dans les milieux aquatiques tend à assurer la préservation d\'habitats nécessaires à la survie d\'espèces protégées. L\'arrêté de protection de biotope est pris par le préfet du département après avis de la commission départementale des sites et il n\'est pas soumis à enquête publique. De manière informelle, l\'avis des conseils municipaux est demandé, mais le préfet peut passer outre à un refus. L\'arrêté fixe les mesures permettant la conservation des biotopes et à ce titre peut interdire ou réglementer certaines activités. A priori, il concerne des espaces relativement restreints. L\'arrêté de protection de biotope ne doit pas être confondu avec une réserve naturelle, et les contraintes qui résultent de sa mise en oeuvre ne doivent pas être trop lourdes. Interrogée sur cet outil de protection, lors de son audition par la mission commune d\'information, Mme Claudine Rysberg, chargée de mission à la direction des études économiques et de l\'évaluation environnementale du ministère de l\'Ecologie et du développement durable, a considéré que l\'arrêté de biotope est un outil « qui doit être manié avec précaution et utilisé à bon escient -sur un territoire relativement restreint- pour protéger une espèce qu\'elle soit animale ou végétale. Dans la mesure où il peut déboucher sur d\'autres types de protection, il constitue un outil d\'attente. Cela fait précisément sa singularité en même temps que sa faiblesse, dans la mesure où il paraît possible d\'envisager d\'emblée d\'autres types de protection plus pérennes et en quelque sorte mieux gérés ». B. DES OUTILS DE PROTECTION QUI DOIVENT S\'INSCRIRE DANS UNE DÉMARCHE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE 1. Vers une utile évolution de la politique des parcs nationaux a) Une organisation juridique fortement centralisée La procédure de création d\'un parc national est conduite par le ministère en charge de la protection de l\'environnement et le territoire est classé en parc national par décret en Conseil d\'Etat. L\'emplacement du parc est inscrit dans le Plan local d\'urbanisme en qualité de servitude d\'utilité publique opposable aux tiers. Le parc national est géré par un établissement public administratif, dont le directeur nommé par le ministre dispose d\'un pouvoir de police dans l\'intérêt de la protection de la nature. Le fonctionnement du parc est assuré par un conseil d\'administration composé de représentants des administrations concernées, des collectivités locales, du personnel et de personnalités qualifiées. Lors de son audition devant la mission commune d\'information, M. Bernard Glass, ingénieur général du génie rural des eaux et forêts à l\'Inspection générale de l\'Environnement a relevé que « le partage politique des parcs nationaux n\'est pas à la hauteur de ce qu\'il pourrait être ». Au cours des déplacements effectués dans les massifs, votre rapporteur a pu entendre de nombreux élus faire état de désaccords voire d\'oppositions permanents entre la direction du parc national et les représentants des collectivités territoriales au sein du conseil d\'administration. Si l\'objectif de protection d\'espaces naturels sensibles particulièrement remarquables a été atteint par les parcs nationaux, il n\'y a pas réellement . Pour donner un second souffle à cet outil de protection remarquable, qui bénéficie d\'une labellisation internationale, il convient de réfléchir à une évolution de ses règles de gestion afin que les collectivités territoriales y soient réellement associées. Les annonces faites par le Gouvernement7(*) « pour décentraliser la gestion du patrimoine naturel » s\'inscrivent dans cette démarche et doivent être appuyées. Proposition n° 1. : Déléguer par voie de convention la gestion des parcs nationaux aux collectivités territoriales b) Garantir la mise en oeuvre d\'une politique de développement en zone périphérique La réglementation sur le territoire d\'un parc national est adaptée à chacun d\'entre eux. Le décret de création réglemente ou interdit un certain nombre d\'activités énumérées par la loi pour éviter l\'altération de l\'aspect, de la composition et de l\'évolution du milieu naturel. Le décret peut édicter des contraintes particulières dans certaines zones, qui deviennent des réserves intégrales, afin d\'assurer une protection plus grande de la faune et de la flore. Enfin, le décret peut prévoir la délimitation d\'une zone périphérique autour du parc dans laquelle sont prévues des mesures pour « permettre un ensemble de réalisations d\'ordre social, économique et culturel tout en rendant plus efficace la protection de la nature dans le parc » (article L. 331-15 du code de l\'environnement). Ce texte là est manifestement insuffisant, selon M. Philippe Huet, pour garantir la mise en oeuvre d\'une politique de développement en zone périphérique. Il importe en effet de définir plus précisément les axes structurants d\'une politique plus complémentaire entre zone centrale et zone périphérique, avec l\'objectif, pour les parcs nationaux, de participer plus activement au développement local. 2. Conforter la contribution des parcs naturels régionaux au développement local a) Des territoires pilotes, pionniers du développement durable La démarche du parc naturel régional s\'inscrit dans une démarche partenariale qu\'il convient de souligner. Les régions prennent l\'initiative de la démarche, les collectivités territoriales s\'engagent sur un projet de développement durable sur un territoire dont l\'identité repose sur un patrimoine naturel commun, et l\'Etat prononce, par décret, le classement, ce qui autorise l\'utilisation de la dénomination « parc naturel régional » et de l\'emblème du parc, marque déposée à l\'Institut national de la propriété industrielle (INPI). Fondée sur la notion de contrat et de libre adhésion, la démarche s\'appuie sur une charte approuvée par les collectivités territoriales et l\'Etat qui fixe . Le renouvellement du classement est prononcé selon la même procédure. La gestion du parc est assurée par un syndicat mixte. L\'article L. 333-2 du code de l\'environnement précise que « les parcs naturels régionaux situés dans les massifs de montagne constituent un instrument exemplaire au service de la protection de l\'équilibre biologique et de la préservation des sites et paysages ». Comme le rappelait M. Jean-Paul Fuchs, président de la Fédération nationale des Parcs naturels régionaux, les actions plus particulièrement menées pour répondre à cet objectif portent sur : « - le maintien d\'une agriculture vivante et gestionnaire de l\'espace par la mobilisation des procédures et aides financières en faveur du pastoralisme ; - la reconquête de l\'espace agricole et des actions en faveur de la diversité biologique des boisements pour lutter contre les conséquences de la déprise agricole ; - des mesures en faveur d\'un tourisme de qualité misant sur la richesse environnementale et paysagère ; - la concertation avec les associations de sports de pleine nature et les guides professionnels et des actions de sensibilisation des participants pour le respect de « codes de bonnes pratiques » ; - la maîtrise de la pénétration des espaces naturels les plus sensibles ; - l\'appui à la création ou à la rénovation d\'hébergements diffus, intégrés au paysage et respectant les contraintes environnementales ; - la préservation d\'espèces animales emblématiques, comme le vautour, le gypaète, le lynx et le loup ». b) Une structure à préserver en zone de montagne D\'un point de vue géographique, il convient de souligner que la grande majorité des parcs de montagne est généralement centrée sur de petits massifs en intégrant les parties hautes des piémonts. De ce fait, beaucoup d\'entre eux voient leur périmètre concerné par plusieurs pays organisés autour des villes et bassins d\'emplois périphériques ou des fonds de vallée, à l\'exception du Parc du Queyras, qui est totalement inclus dans le pays du Briançonnais. M. Jean-Paul Fuchs s\'inquiétait ainsi : « le risque est donc de voir la cohérence et la lisibilité du projet de territoire, porté par le parc, éclatées par des dynamiques différentes, selon chaque pays. Si une réflexion particulière n\'est pas engagée par les collectivités pour différencier les missions du parc ou du pays sur le territoire commun, deux approches différentes du développement pourraient s\'affronter, à terme : - un développement résolument « durable », fondé sur une identité patrimoniale, porté par le Parc ; - un développement par rapport aux pôles urbains, tirant les entreprises dans les vallées et faisant des espaces de montagne des zones d\'habitat résidentiel ou de récréation, porté par les pays ». Comme le prévoit , « si le territoire du pays recouvre une partie du territoire d\'un parc naturel régional, la reconnaissance de la dernière entité constituée nécessite la définition préalable, par convention entre les parties concernées, des missions respectives confiées aux organismes de gestion du parc naturel régional et du pays sur les parties communes. La charte du pays et les actions qui en découlent doivent être, sur les parties communes, compatibles avec les orientations de protection, de mise en valeur et de développement définies par la charte du parc naturel régional en application de l\'article L. 333-1 du code de l\'environnement ». Il convient de veiller à ce qu\'il soit fait une juste application de cette disposition afin de ne pas porter atteinte à la cohérence des parcs naturels de montagne. La recherche de la compatibilité entre les orientations de chaque structure doit résulter d\'un accord entre les parties concernées qui se traduit par une convention. Comme le soulignait M. Jean-Paul Fuchs, devant la mission commune d\'information, « l\'organisation des collectivités territoriales en pays ne pose pas de difficultés aux parcs, lorsque le Conseil régional s\'investit clairement , et contractualise avec ces derniers sur la base d\'un projet global au même titre qu\'avec les pays ». Proposition n° 2. : Veiller, en cas de chevauchement de territoires, à ce que la politique du pays respecte les orientations de protection et de développement du parc naturel régional. 3. Des initiatives décentralisées s\'inscrivant dans une démarche concertée Lors des déplacements qu\'elle a effectués dans les massifs, la mission commune d\'information a visité ou eu connaissance d\'initiatives innovantes en matière de protection de l\'environnement, qui s\'inscrivent dans une logique de gestion locale participative. a) Des exemples de la diversité des démarches locales (1) L\'institution patrimoniale du Haut Béarn Depuis 1994, les trois vallées au Haut-Béarn d\'Ossau, d\'Aspe et de Barétons se sont engagés dans un nouveau mode de gestion de leur territoire et de leur patrimoine naturel à travers la signature avec l\'Etat d\'une charte de développement durable. Se sont ainsi engagés les maires de vingt communes, l\'Association des éleveurs et transhumants des Trois Vallées, la Fédération départementale des chasseurs, le Conseil général des Pyrénées Atlantiques et le Conseil régional d\'Aquitaine. Pour appliquer la charte, a été créée l\'Institution patrimoniale du Haut-Béarn, syndicat mixte ou siègent les maires des vingt communes, cinq conseillers généraux et trois conseillers régionaux. Les décisions du syndicat s\'appuient sur les avis du Conseil de gestion patrimoniale, instance de concertation et de proposition où siègent les élus, des personnalités qualifiées (des représentants des administrations de l\'Etat, de l\'Office national des forêts, de l\'Office national de la chasse et de la faune sauvage, des fonctionnaires territoriaux du Conseil général et du Conseil régional ainsi que des représentants des « valléens » -bergers, chasseurs, pêcheurs, associations de protection de la nature socio-professionnels-). Une équipe de gestion prépare les dossiers et met en oeuvre les décisions du syndicat mixte. Le champ d\'intervention de cette structure couvre l\'agropastoralisme, la forêt, la gestion cynégétique et la gestion de la faune et de l\'ours en particulier. Les clefs de la réussite de cette démarche tiennent au partage par l\'Etat du pouvoir de gestion du territoire avec les acteurs économiques locaux dans le cadre d\'un contrat d\'objectifs et à la démarche concertée avec tous. (2) La SAFER Lozère Lors de son déplacement dans le Massif central, la mission commune d\'information a eu connaissance d\'une démarche innovante et concertée, menée par la SAFER-Lozère, en partenariat avec la Chambre d\'agriculture, tendant à analyser l\'impact des activités d\'élevage sur la conservation de la faune et de la flore. Les territoires géographiques pris en compte sont situés dans les montagnes du sud du Massif central à des altitudes supérieures à 1.200-1.300 m. L\'objectif du programme financé sur des crédits LIFE-environnement portait d\'abord sur le diagnostic à établir sur les conséquences de l\'arrêt de la transhumance, de la suppression des petits élevages et de la forte déprise agricole. Le constat analyse l\'impact négatif de la progression de l\'enfrichement et des milieux qui se referment sur la biodiversité, sur les risques d\'incendie et sur la désintégration du tissu social de ces territoires. Une fois le diagnostic établi, le programme a mis en place, sous forme contractuelle, des aides aux éleveurs qui s\'engagent à réexploiter ces territoires. La SAFER-Lozère a joué un rôle d\'animation foncière en aidant les éleveurs à se grouper dans des groupements pastoraux, pour louer des espaces à des associations foncières pastorales, ou encore des biens sectionnaux ou communaux. Les éleveurs adhérents de ces groupements s\'engagent, à travers un plan de gestion, à une utilisation raisonnée de l\'espace. Ils ont bénéficié -sur 2001-2002- de mesures agrienvironnementales pour financer le démarrage du programme. Au total le programme a porté sur 700.000 euros pour le département de la Lozère et le nord de l\'Hérault, financé comme suit : - 40 % fonds LIFE-environnement ; - 17 % ministère de l\'Environnement et du développement durable ; - 9 % Conseil régional Languedoc-Roussillon, à travers l\'Agence méditerranéenne de l\'environnement ; - 6,7 % Office national des forêts ; - 6,7 % Office national de la chasse et de la faune sauvage ; - 20,7 % Parc national des Cévennes. En juin 2002, huit groupements pastoraux étaient constitués, concernant 29 éleveurs qui utilisaient 2.900 ha pour faire transhumer 6.500 ovins. En outre, une démarche qualité est engagée pour obtenir une certification de conformité pour l\'Agneau de Lozère ainsi qu\'une indication géographique protégée (IGP) au niveau communautaire. b) Des démarches transfrontalières (1) L\'Espace Mont-Blanc En 1989, les élus locaux de Savoie, de la région autonome du Val d\'Aoste (Italie) et du canton du Valais proposent aux Etats la prise en charge, au niveau local, de la gestion et de la valorisation du massif du Mont-Blanc. Il est constitué un « espace » de coopération dénommé Espace Mont-Blanc. Les entités adhérentes sont : - pour la France, le syndicat intercommunal Espace nature Mont-Blanc qui rassemble quinze communes situées en Savoie et Haute-Savoie ; - pour l\'Italie, cinq communes de la région autonome du Val d\'Aoste ; - pour la Suisse, treize communes du Valais. Au total 100.000 personnes sont concernées par la structure qui protège une superficie de 2.000 km² environ. Les organes décisionnels de la structure sont la conférence transfrontalière constituée de cinq membres par pays dont trois au moins, par délégation, doivent représenter les institutions régionales et locales, et la commission permanente. Les activités de l\'Espace Mont-Blanc sont cofinancées par chacune des entités et poursuivent les objectifs suivants : conservation d\'un espace cultivé et d\'une activité pastorale, sauvegarde de la nature et des paysages, encouragement à un tourisme respectueux des ressources et de l\'environnement et enfin, limitation dans l\'impact des transports et de leurs infrastructures. (2) Le réseau alpin des espaces protégés En 1994, la France, lors de sa présidence de la Convention Alpine, a fait valoir l\'intérêt de constituer un réseau alpin des espaces protégés au niveau européen afin de contribuer à l\'application du « protocole de la nature et entretien des paysages » de la Convention. Le réseau rassemble l\'ensemble des gestionnaires des espaces protégés des Alpes (parcs nationaux, parcs naturels régionaux, réserves naturelles...). Il permet une collaboration plus étroite entre l\'Allemagne, l\'Autriche, la France, l\'Italie, la Principauté du Liechtenstein, la Slovénie, la Suisse et la Principauté de Monaco8(*). En 2002, le réseau alpin concerne 300 espaces protégés de plus de 100 ha gérés par plus de 3.000 gestionnaires. Les missions du réseau alpin sont définies par un comité de pilotage international, composé de représentants de tous les pays alpins. Toutes les décisions sont soumises à l\'Assemblée générale qui se réunit tous les deux ans et des groupes de suivi nationaux encadrent le travail courant. Les axes de travail prioritaire sont : - protection et gestion des espaces protégés des Alpes ainsi que de leurs ressources naturelles, habitats et espèces en prenant en considération les conventions et directives internationales en vigueur, et notamment les dispositions pour la mise en place du Réseau Natura 2000 ; - développement d\'un tourisme maîtrisé en cohérence avec la conservation du patrimoine et le projet économique territorial ; - soutien de l\'agriculture et de la sylviculture de montagne concourant au maintien de la biodiversité ; - sensibilisation, information et formation du grand public et de la population locale sur les enjeux naturels et culturels des Alpes ainsi que sur l\'importance de la conservation et des actions engagées. C. INSCRIRE LA MISE EN oeUVRE DE NATURA 2000 DANS UNE APPROCHE CONCERTÉE 1. Un dossier mal engagé a) Les fondements de Natura 2000 L\'objectif de la directive « Habitats Naturels » est de contribuer à assurer la préservation de la diversité biologique européenne, principalement au moyen de la constitution d\'un réseau écologique intitulé « Natura 2000 » de sites abritant les habitats naturels et les habitats d\'espèces de faune et de flore sauvages d\'intérêt communautaire. La directive cherche à concilier cet objectif de protection avec les exigences économiques, sociales et culturelles des Etats membres. Ainsi, la désignation des sites entraînera pour les Etats membres une obligation de résultat, c\'est-à-dire, selon la directive, le maintien ou la restauration des habitats naturels et des habitats d\'espèces d\'intérêt communautaire, dans un état de conservation favorable. Mais l\'article 2, dans son paragraphe 3, précise qu\'il est tenu compte tant des exigences économiques, sociales et culturelles que des particularités régionales et locales. L\'objectif de la directive est donc de mettre en place un réseau d\'habitats dits d\'intérêt communautaire en créant des Zones spéciales de conservation (ZSC) visant la conservation des 253 types d\'habitats, des 200 espèces faunistiques et des 432 espèces végétales figurant dans ses annexes. Ces habitats ou ces espèces sont soit en danger de disparition dans leur aire de répartition naturelle « et sont donc considérés comme prioritaires dans la directive », soit ont une aire de répartition naturelle réduite, sont menacés ou vulnérables ou enfin constituent des exemples remarquables des caractéristiques propres à l\'une ou à plusieurs des six régions biogéographiques européennes. La directive est complétée par six annexes : - annexe I : types d\'habitats naturels d\'intérêt communautaire dont la conservation nécessite la désignation de ZSC (basée sur la classification CORINE-biotopes) ; - annexe II : espèces animales et végétales d\'intérêt communautaire dont la conservation nécessite la désignation de ZSC ; - annexe III : critères de sélection des sites susceptibles d\'être identifiés comme sites d\'importance communautaire et désignés comme ZSC ; - annexe IV : espèces animales et végétales d\'intérêt communautaire qui nécessitent une protection stricte ; - annexe V : espèces animales et végétales d\'intérêt communautaire dont le prélèvement dans la nature et l\'exploitation sont susceptibles de faire l\'objet de mesures de gestion ; - annexe VI : méthodes et moyens de capture et de mise à mort et modes de transport interdits. La constitution de ce réseau fait l\'objet d\'une procédure détaillée prévue aux articles 4 et 5 de la directive et qui requiert une collaboration étroite entre la Commission européenne et les Etats membres : sur la base de listes nationales transmises par les Etats membres, la Commission doit établir la liste des sites d\'intérêt communautaire que les Etats membres devront désigner ensuite en ZSC. Le calendrier prévisionnel de la constitution du réseau « Natura 2000 » s\'établissait ainsi : - établissement d\'une liste nationale de sites (1992-1995) ; - établissement de la liste communautaire (1995-1998) ; - incorporation des sites retenus au réseau « Natura 2000 » (1998-2004), et adoption des mesures de gestion, mais tous les Etats membres ont pris du retard dans la mise en oeuvre de la directive. Il convient de rappeler que la directive 92/43/CEE « Habitats naturels » intègre également les zones de protection spéciale (ZPS) désignées au titre de la directive 79/409/CEE/Oiseaux sauvages. Ainsi, à compter de l\'entrée en vigueur de la directive 92/43/CEE/»Habitats naturels», le 5 juin 1994, l\'article 7 prévoit que les obligations découlant de l\'article 6 paragraphes 2, 3 et 4 se substituent à celles de l\'article 4, paragraphe 4 de la directive 79/409/CEE/Oiseaux sauvages et s\'appliquent tant aux ZPS désignées à cette date qu\'aux ZPS créées ultérieurement. L\'article 6, paragraphes 1 et 2, donne compétence aux Etats membres pour définir les mesures appropriées permettant d\'atteindre les objectifs définis à l\'article 2, afin d\'éviter notamment toute perturbation ou détérioration ayant des effets significatifs sur les espèces ou les habitats visés dans les annexes. En conséquence, et tout en laissant aux Etats membres le soin de définir les moyens permettant d\'atteindre les objectifs fixés, la directive prévoit de façon détaillée à l\'article 6, paragraphes 3 et 4, la procédure d\'évaluation de l\'impact d\'un projet sur l\'environnement, lorsque ce projet est prévu dans une ZSC. - Il s\'agit de s\'assurer que tout nouveau projet d\'activités prend en compte effectivement les intérêts de conservation de la nature. Ceci passe par une évaluation appropriée des incidences du projet sur les objectifs de conservation du site et la consultation du public en cours de procédure. - S\'il est démontré que l\'impact du projet porte préjudice à l\'intégrité du site, les autorités nationales ne peuvent donner leur accord que sous certaines conditions : * s\'il est démontré qu\'il n\'existe pas d\'autre solution ; * si le projet répond à un intérêt public majeur qui peut être de nature sociale ou économique ; * l\'Etat doit alors adopter des mesures compensatoires pouvant, au besoin, prévoir la recréation du même type d\'habitat sur le site ou ailleurs. Enfin, lorsque le site abrite un type d\'habitat naturel ou d\'espèce prioritaire, le projet ne peut porter préjudice à l\'intégrité du site que pour des considérations majeures liées à la santé de l\'homme et à la sécurité publique. En ce qui concerne le régime de protection des espèces, la présence de celles dotées d\'un statut prioritaire justifie, en outre, la mise en place de mesures évitant toute perturbation et dérangement. b) Les difficultés de constitution du réseau Natura 2000 en France (1) Les très fortes oppositions rencontrées Comme le rappelait notre collègue Jean-François Le Grand dans son rapport d\'information9(*) adopté par la Commission des Affaires économiques en avril 1997, le très mauvais contexte dans lequel a été mise en oeuvre la directive 92/43/CEE « Habitats naturels » explique le rejet unanime constaté, en 1996, contre ce texte, et ce parmi l\'ensemble des acteurs du monde rural. Ainsi, relevait-il, on avait à faire à « un texte mal connu, mal interprété, une règle du jeu quasi inexistante, un défaut majeur de communication et à des réactions de défense de la part de certains se sentant pris au piège de l\'intégrisme écologique prôné par quelques autres ». Lors de l\'examen du projet de loi portant transposition par ordonnances de directives communautaires, le Sénat avait, sur proposition du rapporteur pour avis de la Commission des Affaires économiques10(*), adopté un amendement tendant à supprimer la directive « Habitats naturels » de la liste faisant l\'objet du projet de loi d\'habilitation. Par ce vote, le Sénat entendait protester contre la procédure employée par le Gouvernement qui privait le Parlement d\'un débat approfondi sur un sujet majeur pour l\'aménagement de l\'espace rural, en raison de ses répercussions possibles sur des projets d\'infrastructures et de ses atteintes éventuelles au droit de propriété. D\'autant plus qu\'en juin 1998, le Gouvernement avait refusé de débattre de la proposition de loi relative à la mise en oeuvre du réseau écologique européen dénommé « Natura 2000 »11(*), et avait même opposé l\'article 40 à l\'article de la proposition de loi relatif à l\'indemnisation des propriétaires et gestionnaires concernés. Le Sénat a finalement accepté, compte tenu des retards accumulés vis à vis de la Commission européenne, que la transposition de la directive « Habitats naturels » se fasse par voie d\'ordonnance, en imposant que, pour les sites ayant déjà fait l\'objet d\'une transmission à Bruxelles, soient organisées au niveau départemental des réunions d\'information pour les élus des communes concernées. Même si, après une phase de démarrage extrêmement conflictuelle, le dialogue a repris avec profit, la mission commune d\'information a pu constater, au cours de ses déplacements, que les oppositions locales pouvaient rester fortes. Comme le soulignait M. Jean-Paul Fuchs, président de la Fédération des parcs naturels régionaux, « en France, la procédure a été pilotée par l\'Etat, alors que Bruxelles souhaitait qu\'il y ait un dialogue, une participation de l\'ensemble des acteurs ». Les élus locaux rencontrés, opposés à la mise en place d\'un zonage Natura 2000, dénoncent une fois encore ce manque de concertation effective sur la désignation des périmètres. (2) Mais l\'insuffisance des propositions selon la Commission européenne Le réseau Natura 2000 est constitué des zones spéciales de conservation désignées en application de la directive « Habitats » et des zones de protection spéciale désignées en application de la directive « Oiseaux ». Au titre des zones spéciales de conservation (ZSC) : 1.174 propositions de sites couvrant plus de 4 millions d\'hectares (dont 5.000 km² marins et 7,4 % du territoire terrestre) ont été transmises entre octobre 1997 et septembre 2002. La Commission européenne ayant considéré que ces propositions étaient insuffisantes pour certains habitats ou espèces, les préfets ont été saisis de demandes complémentaires : 200 nouveaux sites devraient être proposés en 2002. Parallèlement, la Cour de justice des communautés européennes a condamné la France, le 11 septembre 2001, pour insuffisance de propositions et une nouvelle procédure en manquement a été engagée par la Commission susceptible d\'aboutir d\'ici environ 18 mois à une deuxième condamnation de la France, assortie d\'astreinte. De plus, la Commission a pris la décision de conditionner le versement des fonds structurels (DOCUP 1 et 2 et PNDR) à l\'engagement des Etats membres de transmettre des propositions complémentaires dans les plus brefs délais. Les retards accumulés vis à vis de la Commission européenne ne laissent plus guère de choix. Néanmoins, pour se conformer à la décision du Conseil d\'Etat annulant, le 22 juin 2001, 534 propositions de sites (parmi les 1.109 envoyées à la Commission), les préfets ont repris les procédures de consultation sur ces sites qui devraient être achevées courant 2002. Au titre des zones de protection spéciale (ZPS) : 117 ZPS ont été classées sur 830.000 hectares (1,6 % du territoire). Un contentieux est également engagé par la Commission européenne pour insuffisance globale de classement qui risque d\'aboutir à la condamnation de la France en 2002. 2. Les conditions de redémarrage de Natura 2000 a) Engager un partenariat véritable avec les acteurs locaux Le réseau Natura 2000 est un réseau écologique majeur qui doit structurer la politique européenne de protection de l\'environnement. C\'est une réalité que la puissance publique -Etat et collectivités territoriales- doit désormais prendre en compte. Il faut donc chercher à définir les moyens permettant de sortir de cette impasse afin que les acteurs locaux et les gestionnaires de terrains puissent s\'approprier cette procédure et mettre en oeuvre ce réseau. Comme le soulignait M. Pierre Bernard-Reymond, maire de Gap, devant la mission commune d\'information en déplacement dans les Alpes : « il s\'agit de susciter le dialogue entre les différents pratiquants de la nature pour qu\'ils déterminent ensemble le meilleur équilibre possible et se portent volontaires auprès de l\'Europe pour respecter ces équilibres et lui demander en retour qu\'elle leur apporte son aide ». b) Contractualiser pour mobiliser des moyens financiers (1) Une procédure de gestion concertée et contractualisée La mise en oeuvre de la directive « Habitats naturels » doit permettre d\'encourager des activités économiques compatibles avec les exigences de conservation des habitats et des espèces pour lesquels les sites ont été désignés. Pour cela un document d\'objectifs doit être établi pour chaque site avant 2004. Le décret n° 2001-1216 du 20 décembre 2001 relatif à la gestion des sites Natura 2000 fixe le contenu de ce document et la composition du comité de pilotage chargé de préparer le document d\'objectifs, de son suivi et de son évaluation. Ce comité comprend « les représentants des collectivités territoriales intéressées et de leurs groupements et les représentants des propriétaires et exploitants de biens ruraux compris dans le site... Le comité peut être complété notamment par des représentants des concessionnaires d\'ouvrages publics, des gestionnaires d\'infrastructures, des organismes consulaires, des organisations exerçant leurs activités dans les domaines de la chasse, de la pêche, du sport et du tourisme et des associations de protection de la nature ». La définition des règles de gestion applicable à un site Natura 2000 est donc conduite, sous la responsabilité du préfet du département, par l\'ensemble des parties concernées. Actuellement, la réalisation de 500 documents d\'objectifs est en cours. L\'application des documents d\'objectifs est contractuelle, en application de l\'article L. 414-3 du code de l\'environnement. « Le contrat Natura 2000 comporte un ensemble d\'engagements conformes aux orientations définies par le document d\'objectifs, portant sur la conservation et, le cas échéant, le rétablissement des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la création du site Natura 2000. Il définit la nature et les modalités des aides de l\'Etat et les prestations à fournir en contrepartie par le bénéficiaire. En cas d\'inexécution des engagements souscrits, les aides de l\'Etat font l\'objet d\'un remboursement selon des modalités fixées par décret ». Ce contrat Natura 2000 a une durée minimale de cinq ans qui peut être prorogée ou modifiée par avenant. Comme le précise le décret du 20 décembre 2001 précité les aides financières accordées au titre des contrats Natura 2000 sont versées par le centre national pour l\'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA). Pour les exploitants agricoles, les contrats prendront la forme d\'un contrat territorial d\'exploitation (CTE) ou d\'autres engagements environnementaux. (2) Des moyens budgétaires à mobiliser Au niveau national, des moyens budgétaires importants sont mobilisés pour accompagner la montée en puissance des documents d\'objectifs et des contrats Natura 2000 : - dans le projet de loi de finances pour 2003, le budget du ministère de l\'environnement et du développement durable consacre, au sein du Fonds de gestion des milieux naturels créé en 1999, 19,8 millions d\'euros pour la mise en oeuvre du réseau Natura 2000, soit une progression de + 4,8 % par rapport à 2002 ; - les mesures agro-environnementales (dans ou hors CTE) pourront être également financées sur le budget du ministère chargé de l\'agriculture. Au niveau communautaire, sont également prévus des cofinancements spécifiques à Natura 2000 : - au titre du FEOGA-Garantie dans le cadre du Plan de développement rural national (PDRN) ; - au titre de l\'instrument financier d\'appui à la politique européenne de l\'environnement LIFE, des projets exemplaires peuvent être financés sur des sites Natura 2000. Entre 1992 et 1999, 350 millions d\'euros ont été attribués à près de 500 projets et 300 millions d\'euros sont à nouveau disponibles d\'ici à 2004. II. FAVORISER LA MISE EN VALEUR DES RESSOURCES NATURELLES : L\'EXEMPLE DE L\'EAU ET DE LA FORÊT A. ENCOURAGER UNE GESTION INTÉGRÉE DES HAUTS BASSINS VERSANTS 1. Le rôle stratégique des zones de montagne au regard de la ressource en eau a) Des réservoirs naturels Les zones de montagne sont les « châteaux d\'eau » de la planète et vu leur étendue et leur altitude, elles concentrent une part importante des précipitations dans les parties hautes des bassins versants. En outre, la plupart des grands fleuves prennent leur source en zone de montagne. Mais, compte-tenu de la pente et du relief, conjugués à une végétation souvent rase et fragile du fait d\'un climat plus rude, les montagnes sont des zones d\'intense érosion et de concentration rapide des eaux, ce qui entraîne des crues et inondations qui pourront être ravageuses pour les parties basses des bassins et les plaines. Ces situations peuvent être aggravées sous l\'effet des activités humaines. Ainsi en est-il de l\'imperméabilisation du sol par les constructions, les aires de stationnement et les routes, en particulier dans les zones de fort développement urbain et touristique. A l\'inverse, l\'abandon des secteurs les plus difficiles par la population et les activités économiques traditionnelles, comme le pastoralisme, peuvent avoir pour conséquence la destruction des ouvrages collectifs, les terrasses, les drainages et le retour à la friche... En définitive, on peut caractériser les « têtes de bassin » comme des zones à forte pluviométrie donnant naissance à de nombreuses rivières. Il s\'agit de zones de relief, avec des chevelus de cours d\'eau de bonne qualité, plus ou moins préservés de la pollution, mais artificialisés avec la présence de barrages, de microcentrales ou encore le drainage des zones humides. Ce sont parfois des territoires en déprise économique et humaine avec néanmoins un fort potentiel de développement économique lié à l\'eau. b) Mais une qualité des eaux qui se détériore D\'une part, il convient de souligner qu\'en dépit de son abondance apparente, l\'eau naturellement potable peut être rare en zone de montagne compte tenu de la géologie complexe des massifs. Les ressources en eau ne présentent pas toujours les qualités physico-chimiques requises car elles peuvent être séléniteuses, turbides ou contenir des métaux toxiques tels que l\'arsenic ou l\'antimoine. Le renforcement des normes communautaires sur ces paramètres pourrait ainsi conduire à l\'abandon de certains captages. En outre, les eaux parfois très agressives, caractéristiques des massifs cristallins présentent des risques de dissolution des matériaux constitutifs des canalisations et notamment du plomb. D\'autre part, ces ressources de type granitaire sont très vulnérables et sensibles aux pollutions de surface, notamment aux contaminations bactériologiques. Force est de constater que la qualité des petits cours d\'eau en amont se détériore, et ceci est dû à la combinaison de plusieurs facteurs, la réalité des problèmes différant fortement d\'un bassin à l\'autre, comme le soulignait M. Jean-Paul Chirouze, directeur de l\'Agence Rhône-Méditerranée-Corse devant la mission commune d\'information : « Les problèmes de l\'eau dans les Alpes ne sont pas les mêmes que dans le Massif central. C\'est ainsi qu\'il peut non seulement y avoir des pollutions locales fortes dans des grandes villes telles Grenoble, mais aussi des pollutions diffuses dans les domaines de l\'industrie et de l\'agriculture, à prendre spécifiquement en compte. A titre d\'exemple, le bassin de l\'Arve en Haute-Savoie connaît des problèmes de pollution liés à l\'activité de la mécanique ou du traitement de surface concernant plus d\'un millier de petits industriels. Autre exemple sur le bassin Rhône-Méditerranée-Corse : le Jura qui subit, lui, la pollution organique d\'activités laitières et fromagères, ces coopératives ayant dû travailler ensemble pour améliorer en six ans la situation des cours d\'eau ». En outre, et de manière paradoxale, ajoutait-il « l\'assainissement réalisé dans de petites communes a pu être défavorable, car de telles infrastructures ont conduit à concentrer les rejets ». 2. L\'eau en montagne, une source de richesse et de développement, donnant lieu à des conflits d\'usage a) L\'importance de l\'énergie hydraulique (1) Etat des lieux de l\'énergie hydraulique produite en zone de montagne La production hydroélectrique française représente 14 % de la production totale d\'électricité, soit 70 térawatt/heure (TWh), ce qui correspond à une puissance installée totale d\'environ 25 gigawatts (GW). A l\'heure actuelle, plus de 2.000 centrales sont exploitées en France, dont : - 1.810 de puissance inférieure à 10 MW (total de 2 GW) ; - 281 de puissance supérieure à 10 MW (total de 22,5 GW) ; La production d\'hydroélectricité est principalement située dans les Alpes (70 %), puis dans le Massif central (20 %) et les Pyrénées (10 %). EDF, au titre de sa production d\'hydroélecticité, exploite : - 150 barrages où sont stockés 7 milliards de m3 d\'eau, soit ¾ des réserves nationales en eau de surface ; - 500 centrales pour une puissance installée de 20 GW. Ces installations hydrauliques représentent 20 % de la puissance installée totale d\'EDF. Elles sont très rapidement mobilisables et capables de stocker de l\'eau, donc de l\'énergie pour les périodes de pointe hivernales. En dehors d\'EDF, qui est le principal producteur, il convient de citer la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) qui produit 16 TWh, soit 25 % de la production hydroélectrique française. Les producteurs indépendants produisent 4 TWh/an en moyenne. Le secteur de la petite hydroélectricité (7 TWh au total) est adossé à un secteur industriel performant. En dehors des performances de l\'énergie hydraulique dans la lutte contre l\'effet de serre, il faut souligner . Dans certaines zones de montagne, c\'est bien souvent la seule activité économique qui subsiste, avec un certain nombre d\'emplois à la clef. (2) Les handicaps de l\'énergie hydraulique Des contraintes environnementales à prendre en compte Sur le plan environnemental, la loi du 29 juin 1984 relative à la pêche, ou encore la loi du 3 janvier 1992 sur l\'eau ont eu un impact direct sur la production hydraulique, soit que l\'eau ne soit plus turbinée, soit qu\'elle le soit différemment et de façon moins optimisée par rapport aux besoins. Ainsi, le relèvement des débits réservés au dixième du module, comme le prévoit l\'article L. 432-5 du code de l\'environnement représente une perte de près de 4 % de la production hydroélectrique et est évalué à 1 % du coût du kWh. Plus généralement, et il convient de s\'en féliciter, chaque renouvellement de concession s\'accompagne de nouvelles mesures environnementales, qui ne sont pas sans impact sur le niveau de la production. Mais, néanmoins, l\'opposition reste forte entre les partisans de l\'équipement des rivières en micro-centrales pour développer la production d\'énergies renouvelables et ceux qui dénoncent les atteintes environnementales de ces infrastructures et l\'impact lourd en matière de pêche. Une fiscalité pénalisante La fiscalité pesant sur l\'hydroélectricité n\'a cessé de progresser ces dernières années et les taxes représentent désormais 40 % du coût de production, ce qui ne favorise pas son développement. L\'évolution des principaux postes sur les cinq dernières années est : EVOLUTION DE LA FISCALITÉ EN M€ RECONSTITUÉE POUR LE PARC EDF ACTUEL Source : EDF Comme le soulignait Mme Claude Nahon, déléguée au domaine hydraulique d\'EDF, lors de son audition devant la mission commune d\'information, les gains de productivité obtenus ont été intégralement compensés par des augmentations de la fiscalité. Par ailleurs, les charges d\'amortissement s\'élèvent en moyenne à 15 ou 20 % et ne baissent que très faiblement compte tenu des charges d\'entretien des ouvrages. Ainsi, la rentabilité des investissements en matière d\'hydroélectricité n\'est pas jugée satisfaisante comme le relevait Mme Claude Nahon : « l\'hydroélectricité n\'est pas rémunérée en France à la hauteur des ambitions de sa politique énergétique. Dans l\'état actuel des choses, il nous manque 10 % pour boucler un projet d\'investissement dans ce secteur... Il n\'est guère possible de développer un produit en le surtaxant. » (3) Un potentiel de développement limité L\'engagement français au plan communautaire est fort La directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 septembre 2001, prévoit qu\'à l\'horizon 2010, la production d\'électricité d\'origine renouvelable devra atteindre 22 % en Europe et 21 % en France (contre 14 % aujourd\'hui), cet engagement ayant pour objectif de limiter le taux de dépendance énergétique de l\'Union européenne (évalué à 70 % en 2030) et de limiter les émissions de gaz à effet de serre. Le potentiel techniquement utilisable est limité Le potentiel « sauvage » a été évalué à 270 TWh, mais techniquement, le potentiel « équipable » est estimé à 100 TWh, mais à des coûts très élevés, qui ne permettent pas de rentabiliser les projets. En définitive, le potentiel économique est évalué entre 4 et 8 TWh. En outre, la prise en compte des exigences environnementales renchérit le coût des projets. Le développement de la PHE (petite hydroélectricité d\'une puissance inférieure à 8 MW) nécessite, d\'un point de vue économique, une tarification incitative pour équiper les sites restant à exploiter. Plus généralement, il est tributaire des arbitrages qui seront rendus sur l\'évaluation de son impact global sur l\'environnement. L\'objectif de 4 TWh/an attribué à la PHE proposé par les syndicats de producteurs d\'hydrauliques, implique en effet la réalisation de nouvelles installations, ce qui, a priori, ne peut se faire sans modifier le classement des rivières réservées au titre de la loi du 16 octobre 1919. En contrepartie, il doit être procédé à une évaluation précise de la contribution de la PHE à la lutte contre les effets du changement climatique et de l\'impact des dispositifs annexes aux micro-centrales comme les échelles à poisson et les mécanismes de dévalaison conçus pour atténuer les conséquences négatives de ces équipements hydrauliques sur leur environnement immédiat. b) Des conflits d\'usage de plus en plus marqués (1) Une méconnaissance mutuelle entre l\'aval et l\'amont L\'interdépendance géographique et physique résultant de l\'unité de la rivière et du partage de la ressource ne s\'est pas -loin s\'en faut- traduit dans la mise en place de structures permettant de tenir compte des intérêts de l\'amont et de l\'aval. Les intérêts légitimes des uns et des autres sont perçus négativement et leur non prise en compte génère des conflits. Faute de réglementation sur la solidarité financière inter-bassin ou de mise en commun des connaissances, des actions contradictoires sont parfois mises en oeuvre par une multitude d\'acteurs aux intérêts concurrents. L\'unité des rivières ne correspond plus à une réalité et le sentiment de solidarité et d\'appartenance à un même bassin versant s\'est fortement estompé. Or, cet enjeu est stratégique dans de nombreux domaines. Ainsi, une politique de prévention des inondations se doit d\'être globale pour être pertinente. Elle passe par une nouvelle gestion de l\'espace et de l\'eau qui intègre la dimension « amont/aval ». Certes, l\'aval doit repenser son développement urbain hors zone d\'expansion des crues pour ne pas augmenter le risque d\'inondation, mais les têtes de bassin ont également un rôle primordial à jouer pour ralentir le débit des rivières en période de crue, à la faveur de la gestion des sols et des cours d\'eau. Malgré l\'identification de tels enjeux, force est de constater que les problèmes restent traités au coup par coup. Ainsi très peu de schémas d\'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), institués pourtant par la loi du 3 janvier 1992 sur l\'eau, ont été mis en place. Ce document permet de définir des objectifs d\'intervention concernant la ressource, les inondations, la dépollution ou encore la protection des captages d\'eau potable. Elaboré à partir d\'une longue concertation entre les différents usagers, il constitue, une fois adopté, un document opposable aux tiers. Par ailleurs, la procédure des contrats de rivière, qui peut constituer une étape préalable intéressante avant la rédaction d\'un SAGE ou, à tout le moins, lui apparaît comme complémentaire, reste aujourd\'hui excessivement centralisée. Ce dispositif, créé en 1981 et adapté par des circulaires successives12(*), a évolué vers une prise en compte globale et intégrée de la rivière et de son écosystème, les efforts financiers de l\'Etat étant recentrés sur les travaux de restauration du lit et des berges, ainsi que sur la mise en place de structures pérennes de gestion. Il s\'agit d\'un contrat signé entre l\'Etat, les collectivités locales, les propriétaires riverains et les agences de l\'eau, qui constitue un label national. L\'accord sur le contrat de rivière doit être soumis, tant pour le dossier préalable présenté à l\'initiative des élus locaux, que pour le dossier définitif incluant le programme d\'actions défini par le comité de rivière, à l\'avis favorable du comité national d\'agrément des contrats de rivière ou de baie, défini par l\'arrêté ministériel du 22 mars 1993, et dont le président est désigné par le ministre. La mission commune d\'information souligne tout l\'intérêt qu\'il y aurait à déconcentrer la procédure des contrats de rivière à une échelle pertinente, qui lui paraît être celle d\'un bassin hydrographique. Proposition n° 3. : Déconcentrer la procédure d\'élaboration d\'un contrat de rivière, au niveau du préfet coordonnateur de bassin. (2) Des conflits d\'usage plus marqués au sein des « têtes de bassin » L\'évolution rapide d\'une société agropastorale vers une société touristique s\'est traduit par une véritable révolution des usages de l\'espace et de la ressource en eau dans les zones de montagne. Dans les vallées des têtes de bassin versant, où les terrains plats sont rares, le développement des constructions se heurte à la nécessaire prise en compte de la rivière. Les conflits d\'usage résultant du développement touristique portent d\'une part sur la gestion qualitative et quantitative de la ressource en eau en période hivernale ; l\'afflux de touristes concentré sur une très courte période accroît la demande en eau potable. Ainsi, en Haute-Savoie, les collectivités situées en tête des hauts bassins reçoivent en haute saison touristique plus de la moitié du flux touristique, soit 400.000 lits concentrés sur 20 % du territoire du département. La population est multipliée par 7 ou 10 alors que les débits d\'étiage peuvent être au plus bas. En effet, dans les territoires de haute montagne, si la ressource hydrographique est globalement abondante, la ressource effectivement mobilisable en hiver est faible, surtout sur des bassins versants de taille réduite. RESSOURCE EN EAU MOBILISABLE EN FÉVRIER Cours d\'eau à régime glaciaire : < 10 l/s/km² Cours d\'eau à régime nival : > 20 l/s/km² Cours d\'eau de plaine à régime pluvial : < 20 l/s/km² Pour une station de sports d\'hiver, dont la population atteint 30.000 habitants, les besoins sont évalués à 6.000 m3/j, soit un débit moyen journalier d\'environ 70 l/s. En outre, toute baisse du débit d\'étiage restreint la capacité auto-épuratoire du cours d\'eau. Les besoins en neige de culture sont amenés à se renforcer pour augmenter la sécurité sur les pistes et assurer le bon déroulement du début et de la fin de saison. La production de neige de culture, qui se caractérise par une consommation d\'eau importante, se concentre de novembre à février et donc à une période de faible étiage. La ratio de consommation « théorique » communément admis pour la production de neige de culture est de 1 m3 d\'eau pour 2 m3 de neige fabriquée. Un état des lieux réalisé dans le périmètre de l\'Agence de l\'eau Rhône-Méditerranée-Corse fait état de 104 stations équipées, pour 15 % des surfaces skiables en moyenne et la consommation d\'eau observée sur un an est estimée de 6,6 millions de m3. Les trois types de mobilisation de l\'eau pour la fabrication de la neige de culture sont : - le prélèvement direct dans la ressource (cours d\'eau ou plus rarement ressources souterraines), ce qui pose des problèmes compte tenu du faible niveau d\'étiage ; - le prélèvement dans les réseaux d\'eau potable, ce qui est peu satisfaisant. Des pénuries ont déjà été recensées et la priorité doit être donnée au maintien de la distribution d\'eau potable aux populations ; - la mise en place de retenues collinaires, solution la plus utilisée, car elle présente l\'avantage « de décaler » dans le temps le prélèvement sur le cours d\'eau et de mobiliser par drainage les eaux de ruissellement. Mais l\'autorisation administrative de construire une retenue tient compte de trois paramètres, liés au respect du débit réservé du cours d\'eau, à la préservation des milieux naturels remarquables ou préservés, notamment les zones humides, et aux impératifs de sécurité. Ceci explique que certains projets ne puissent être réalisés. Les conséquences du développement touristique sur la demande d\'eau doivent également tenir compte de la production hydroélectrique qui mobilise une ressource en eau très importante. Enfin, le développement de produits touristiques estivaux peut donner lieu à des conflits d\'usage. Il s\'agit des sports d\'eaux vives sous toutes leurs formes (du canoë cayak au canyonning). Là également, les usages liés à ces pratiques viennent concurrencer d\'autres utilisations de la ressource en eau : les besoins en irrigation de l\'agriculture, mais surtout la production d\'hydroélectricité. Ainsi, EDF a dû savoir prendre en compte ces nouveaux usages de l\'eau à travers des partenariats, des protocoles signés au niveau national ou des conventions avec des acteurs régionaux ou locaux. Dès l\'origine, l\'aménagement du lac de Serre-Ponçon (200 millions de m3 réservés) a été prévu pour alimenter la Durance en aval en eau d\'irrigation. C\'est également un outil remarquable pour l\'économie touristique des Haute-Alpes. En outre, EDF a conclu une convention sur quatre ans avec la Fédération française de canoë kayak (FFCK) qui est régulièrement reconduite pour promouvoir la pratique des sports d\'eaux vives et un protocole annuel définit un programme de lâchers d\'eau pour permettre diverses manifestations. 3. Promouvoir une gestion intégrée des hauts bassins versants a) Prendre en compte les obligations communautaires à venir La directive du 23 octobre 2000 établissant un cadre communautaire de l\'eau affiche des objectifs ambitieux et exige un cadre d\'organisation très rigoureux. (1) Les objectifs poursuivis par la directive-cadre Le principe général de la directive-cadre est de définir, pour tous les milieux aquatiques continentaux et côtiers un cadre poursuivant les objectifs suivants : - Sur le plan technique, est fixée une obligation de résultats ; d\'ici à 2015 il faudra attendre le « bon état » -chimique, biologique, physique et hydrologique- pour l\'ensemble des milieux considérés. Des dérogations seront possibles mais dans des cas limités et elles devront être motivées. Elles pourront porter sur les délais, l\'objectif de « bon état » pour les milieux très pollués ou encore la définition de dispositions spéciales s\'agissant de milieux artificiels ou fortement modifiés. - Sur le plan de l\'organisation, le cadre de la planification s\'appuie sur la constitution de « districts hydrographiques », unités de base de la gestion de l\'eau et la désignation des « autorités compétentes » responsables de la mise en oeuvre des mesures. Au préalable un état global du bassin doit être effectué en 2004 sur la base duquel doit être élaboré un plan de gestion en 2006, décliné à travers un programme de mesures défini en 2009 et opérationnel en 2012 afin d\'atteindre l\'objectif de « bon état » du milieu aquatique concerné. Le plan de gestion s\'inscrit dans une révision et un élargissement du contenu du SDAGE (schéma directeur d\'aménagement et de gestion des eaux). - La directive-cadre introduit également une forte dimension économique à travers la notion de coût disproportionné pouvant justifier un régime dérogatoire et une approche « coût-bénéfice » dans l\'analyse et le choix des actions à conduire. En outre, d\'ici à 2010 les systèmes de tarification des usages de l\'eau doivent inciter à une utilisation rationnelle de cette ressource et permettre une contribution appropriée de chaque secteur (domestique, industriel et agricole) aux coûts réels (techniques et environnementaux) de consommation d\'eau. - Enfin, la directive-cadre affirme la nécessité d\'une meilleure participation du public au processus de planification, à travers une communication en amont lors des différentes étapes d\'élaboration du plan de gestion et du programme de mesures, et l\'obligation, à chaque étape de la consultation, de respecter un délai de six mois pour recueillir l\'avis du public. (2) Les implications de la directive-cadre pour les zones de montagne Le cadre général de la directive n\'établit pas de distinction directe selon les milieux géographiques, mais les conditions de sa mise en oeuvre présentent des enjeux spécifiques pour les zones de montagne. - S\'agissant de l\'objectif fixé quant au bon état des milieux aquatiques, les têtes de bassin peuvent être prises comme référence. A l\'inverse, les dérogations sur cet objectif admises pour les milieux fortement modifiés pourront trouver à s\'appliquer sur les cours d\'eau ou plans d\'eau, supports d\'équipements nécessaires à la production d\'hydroélectricité. - La mise en oeuvre de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines, adoptée en 1991, impose des obligations lourdes aux collectivités locales, tant en ce qui concerne la collecte que le traitement des eaux usées à mettre en oeuvre avant fin 2005. En particulier, les difficultés seront importantes pour les stations touristiques caractérisées par des fortes variations de population, et des pics de fréquentation concentrés sur de courtes périodes pendant lesquelles les capacités d\'auto-épuration des cours d\'eau sont faibles en raison du niveau d\'étiage. - La nouvelle directive sur la qualité de l\'eau potable adoptée en 1998 impose des règles strictes s\'agissant des points de captage. En zone de montagne, ces points de captage sont multiples et de faible importance unitaire ; une évaluation de leur protection devra être établie, sans doute en privilégiant l\'approche « coût-bénéfice ». b) Les conditions d\'une gestion intégrée des ressources en eau Lors du colloque organisé à Megève en septembre 2002 sur la gestion intégrée des hauts bassins versants, auquel ont participé les délégués de plus de vingt pays, il a été réaffirmé la nécessité d\'organiser une gestion effective et intégrée au niveau des bassins versants, en définissant le rôle et les compétences de chaque intervenant. La mission commune d\'information fait siennes les recommandations et les propositions qui ont été faites au cours de ce colloque. (1) Un cadre décentralisé de gestion Il faut ainsi réaffirmer que le niveau des prises de décision, de maîtrise d\'ouvrage et d\'exploitation doit être décentralisé au plus près du terrain. - A côté des administrations gouvernementales compétentes, la participation des représentants des autorités territoriales concernées, des différentes catégories d\'usagers de l\'eau et des écosystèmes aquatiques, ainsi que des associations porteuses d\'intérêts collectifs de la société civile, doit être assurée au sein des conseils ou comités de bassin. Il convient de prévoir et organiser l\'information et la formation des cadres des administrations et des organismes de bassin, ainsi que celle, sous des formes appropriées, des membres des comités de bassin, des élus locaux et des représentants des usagers. Proposition n° 4. : Des schémas d\'aménagement doivent être élaborés par bassin versant, dans la concertation, le consensus et la co-responsabilité pour fixer les objectifs à atteindre à moyen terme. - Pour connaître l\'état de la ressource et des milieux, il faut recenser les usages, faire le bilan des pollutions et par la suite évaluer l\'efficacité des programmes mis en oeuvre. Pour cela, il faut pouvoir disposer de systèmes d\'information harmonisés afin de permettre des synthèses et des comparaisons inter-bassins. Proposition n° 5. : Elaborer pour chaque bassin versant un système intégré d\'observation et de monitoring fiable et représentatif et constituer des bases de données. (2) Des moyens financiers adaptés Il est certain que la réalisation des programmes d\'intervention nécessaires pour remplir les objectifs fixés par le schéma directeur entraînera nécessairement des investissements importants pour gérer et préserver la ressource en eau et les écosystèmes et pour assurer la maintenance et le renouvellement des équipements. Ceci mobilisera des moyens financiers considérables. Le mécanisme des redevances de bassin fondé sur l\'application du principe « pollueur-payeur » et « utilisateur-payeur » doit être renforcé. En outre, les services collectifs d\'eau potable, d\'assainissement et d\'irrigation doivent être facturés à leur coût véritable, tout en assortissant ce mécanisme de dispositifs de péréquation. B. RELANCER UNE POLITIQUE FORESTIÈRE VALORISANTE 1. Les spécificités des forêts en zone de montagne Les forêts de montagne tiennent, par nature, une place multifonctionnelle. En matière de protection, elles assurent un rôle de contention et de limitation de différents phénomènes naturels. Elles remplissent une fonction de préservation du milieu naturel, en abritant des espèces végétales et animales très variées. Elles assurent une fonction sociale évidente, en s\'inscrivant dans des paysages de montagne de grande qualité et en accueillant de nombreux utilisateurs. Elles remplissent enfin une fonction économique longtemps primordiale pour l\'économie locale, qui, tant bien que mal, est censée permettre à la forêt d\'assurer aujourd\'hui encore cette multifonctionnalité exemplaire. L\'équilibre économique fragile, en raison de handicaps naturels structurels et des contraintes pesant sur les marchés du bois, suppose pour être atteint que ceux-ci soient compensés. Il convient également pour encourager la multifonctionnalité de la forêt de montagne, de s\'inscrire dans une démarche concertée. a) Etat des lieux (1) Prédominance des massifs forestiers La forêt de montagne tient une large place dans l\'espace montagnard (le taux de boisement est de l\'ordre de 40 %, alors que la moyenne nationale est de 25 %). Elle représente 37 % du potentiel national en superficie comme en volume sur pied, et les enjeux directs de la gestion multifonctionnelle de cette forêt, en terme d\'aménagement et de développement durable des territoires de montagne, sont plus grands que ceux de la plupart des forêts de plaine, notamment par leur rôle de réduction des phénomènes naturels d\'érosion. Une place plus forte est accordée aux sapins et épicéas (24 %) et les forêts non soumises au régime forestier (71 %) prédominent. Au cours des dix dernières années, la progression de la forêt de montagne a été supérieure à la moyenne nationale (6 % contre 3 %). RÉPARTITION DES VOLUMES DE BOIS SUR PIED Types de forêts Volume (milliers de m3) % m3/ha Forêts de plaine et collines 1.261.240 63,37 146 Forêts de montagne 671.576 33,74 172 Forêts méditerranéennes 57.545 2,89 55 Total 1.990.361 100 % 146 Source : Inventaire forestier national, hors peupleraies - 1999 Schématiquement, du point de vue des handicaps et de l\'exploitation, on peut distinguer : - des massifs de moyenne altitude, au taux de boisement élevé, au réseau de desserte forestière dense, connaissant une production biologique élevée, base d\'une exploitation forestière et d\'une filière bois active. C\'est le cas, des Vosges (330.000 ha), du Jura (225.000 ha) et, à un degré moindre, du Massif central (1.860.000 ha) ; - des massifs de haute montagne, où l\'exploitation se heurte à des handicaps naturels liés à l\'altitude, à la pente et à la situation socio-économique locale ainsi qu\'aux contraintes imposées par la protection de l\'environnement. C\'est le cas des Alpes (1.210.000 ha) et des Pyrénées (400.000 ha) ; - des massifs méditerranéens où les peuplements forestiers de faible valeur économique subissent la menace constante des feux de forêts. C\'est le cas de la forêt de Corse (100.000 ha), de la frange littorale des Alpes du Sud et des Pyrénées-Orientales, voire de l\'Ariège. Les forêts de montagne se caractérisent aussi par une importante accumulation de bois sur pied : le volume moyen par ha (165 m3) est supérieure de 20 % à la moyenne nationale. L\'accroissement du volume de bois sur pied enregistré au cours des dix dernières années (+ 17 %) a été sensible dans certains massifs. Ce phénomène d\'accumulation de bois sur pied traduit en fait le vieillissement des peuplements ; d\'ailleurs dans la plupart de ces massifs montagnards, les taux de prélèvement de bois sont parmi les plus faibles de France. Cette caractéristique révèle la sous-exploitation des forêts de montagne, qui est particulièrement marquée dans les Alpes et en Corse. Parmi ces forêts de montagne, 300.000 ha relèvent de séries domaniales classées sous servitude de Restauration de terrains en montagne (RTM), acquises ou expropriées entre 1860 et 1914. Le service RTM, placé sous l\'autorité du ministère de l\'agriculture, de l\'alimentation, de la pêche et des affaires rurales y conduit une politique de prévention des risques naturels. Par ailleurs, il faut évoquer l\'application de la loi du 28 avril 1922 dite « loi Chauveau » instaurant le statut de forêt de protection, pour, en montagne, classer des terrains boisés dont la conservation était nécessaire au maintien des terres. Ceci permettait d\'accroître les possibilités de contrôler la gestion forestière en dehors des périmètres RTM domaniaux et de lutter contre l\'exploitation abusive de certains massifs forestiers. L\'essentiel des forêts de protection se trouve dans les Pyrénées (34.786 ha) et dans les Alpes (13.629 ha) et depuis 1982 sept classements ont été prononcés dans des départements de montagne (Savoie, Alpes de Haute Provence, Hautes-Alpes et Vaucluse). Enfin, il faut souligner que le statut de forêt communale est fortement représenté dans les massifs montagneux. Ainsi dans les Vosges, le Jura, en Franche-Comté et dans l\'Ain, les forêts publiques, sous maîtrise communale pour l\'essentiel, représentent plus de la moitié des espaces boisés (33 % pour l\'ensemble de la France). (2) De bons indicateurs de santé Les différents indicateurs de tableaux de bord disponibles témoignent dans l\'ensemble du bon état de la santé des forêts de montagne. Celles-ci présentent des spécificités par rapport aux forêts de plaine en matière de pathologie des arbres, en raison des rigueurs climatiques, du vieillissement des peuplements, de la pluviométrie élevée et de la prédominance des résineux. Les rigueurs du climat montagnard sont à l\'origine de risques spécifiques : ainsi les bris dues aux neiges lourdes mettent à la disposition des insectes d\'importants stocks de bois mutilés, qui peuvent favoriser la multiplication des insectes sous-corticaux (hylésine, sténographe, érodé, pissode), au point de menacer parfois les bois sur pied. Les épisodes de gels précoces peuvent aussi être à l\'origine du dépérissement actuel du hêtre dans les Ardennes belges. Par ailleurs, les contraintes fortes à l\'exploitation des peuplements propres aux zones de montagne (fortes pentes, faible desserte), sont à l\'origine d\'un vieillissement des peuplements, en particulier dans les séries RTM. Ce vieillissement donne à certaines pathologies l\'occasion de s\'exprimer. C\'est par exemple le cas du gui, ou de l\'armillaire dans les peuplements de sapin. Il faut enfin souligner que les pathologies des arbres forestiers en zone de montagne présentent un tableau différent de zones de plaine tout simplement parce que la palette des essences y est différente, avec en particulier 55 % de résineux, contre 35 % au plan national. Or beaucoup de pathogènes ou de ravageurs ont partie liée avec une essence, ou un groupe d\'essences. Il faut souligner que l\'état de santé des résineux, lorsqu\'ils n\'ont pas été plantés dans des conditions trop différentes de leur optimum écologique (comme cela a été le cas pour nombre de plantations d\'épicéas en plaine), n\'est pas plus mauvais que celui des feuillus. En particulier, les déficits foliaires observés dans le réseau européen de suivi des dommages forestiers affectent moins les résineux que les feuillus. Enfin, les forêts de montagnes sont soumises à une pluviométrie élevée, qui favorise l\'acidification naturelle des sols, et accroît la part de dépôts acides reçus du fait des activités humaines. Ces dépôts sont de surcroît plus intenses dans les forêts de résineux, dont le feuillage, généralement persistant, filtre l\'atmosphère et collecte les dépôts toute l\'année, et dont la litière est en général naturellement plus acidifiante que celle des feuillus. La conjonction de ces facteurs expose les forêts de montagne, en particulier dans la moitié nord de la France (où les pluies sont plus chargées) au risque d\'acidification des sols. Source : Département Santé des Forêts - DERF - Ministère de l\'Agriculture Les tempêtes de 1999 ont diversement affecté les massifs forestiers en montagne. Ainsi, si les massifs alpins et pyrénéens ont été relativement peu touchés, les forêts des Vosges ainsi que du Jura ont été très sévèrement endommagées. On estime que l\'équivalent de dix récoltes annuelles ont été ainsi perdues, ce qui impose de réviser l\'ensemble des aménagements forestiers et des plans de gestion et aura des conséquences à court terme sur la santé des espaces forestiers. Le Massif central a été également sévèrement atteint par les tempêtes et plus particulièrement le Limousin, notamment le massif de la Margeride. En dehors de cet événement climatique exceptionnel, de fortes inquiétudes étaient apparues au début des années 80 quant à l\'état de santé à moyen terme des massifs forestiers en moyenne montagne en raison de l\'acidification des sols. Ainsi, dans les Vosges ou les Ardennes où se conjuguent dépôts acides importants et roche pauvre, des problèmes d\'acidification des sols apparaissent conduisant à une symptomatologie « de dépérissement » (jaunissement ou défoliation) constatée pour l\'épicéa et le sapin. Un dispositif de suivi a été mis en place avec le soutien de l\'Union européenne. Comme le relevait M. Michel Badré, directeur général adjoint de l\'Office national des forêts (ONF) lors de son audition : « La communauté scientifique forestière s\'accorde désormais pour considérer que cette grosse alerte était en réalité la conséquence de deux ou trois années de sécheresse exceptionnelle à la fin des années 70. Nous avons donc assisté, cinq ou six ans après, au contrecoup -classique en forêt- de cette sécheresse. En revanche, depuis vingt ans, aucune dégradation significative n\'est à noter dans la santé des massifs de moyenne montagne. Toutefois, les tendances de très long terme font apparaître de manière significative une augmentation de la production ligneuse dans les forêts. Ce phénomène est probablement corrélé à l\'augmentation du taux de CO2 dans l\'atmosphère. Cette accélération de la photosynthèse peut entraîner un appauvrissement de la composition des sols à laquelle il faut être vigilant ». Enfin, s\'agissant des surfaces acquises au titre de la RTM, une partie importante a été reboisée en essences rustiques, pin noir pour l\'essentiel, afin de protéger les sols. Ces arbres doivent désormais être coupés et exploités et se posent alors les problèmes techniques de recomposition d\'une forêt plus diversifiée, pour reconstituer progressivement le sol. b) Identification des difficultés d\'exploitation des massifs forestiers et des faiblesses de la filière bois (1) Les difficultés d\'exploitation Le phénomène de vieillissement et de fragilisation progressive des forêts de montagne est accentué par la perte régulière de leur rentabilité économique. Cette analyse vaut pour les forêts situées en haute montagne, qui sont insuffisamment desservies et où l\'exploitation du bois est déficitaire. Il s\'agit de forêts situées sur des pentes abruptes ou difficilement accessibles, où compte tenu de l\'altitude, la production de bois y est plus faible et de moins bonne qualité. Au coût d\'exploitation, incluant le salaire des bûcherons et le coût du tracteur pour amener le bois en bord de route, il faut ajouter, en haute montagne, des surcoûts de bûcheronnage ou de débardage. Parfois, il est nécessaire de débarder par câble, voire même par hélicoptère, ce qui renchérit très fortement les coûts d\'exploitation. Dans les conditions extrêmes d\'exploitation, la valeur nette du bois en valeur « sur pied » devient souvent négative. Ceci est d\'autant plus fréquent qu\'on enregistre une diminution quasi constante du prix du bois sur pied. Les pouvoirs publics ont pris la mesure des difficultés rencontrées et comme le relevait M. Michel Badré devant la mission commune d\'information, des mesures ont été adoptées pour « réduire le handicap économique incontestable dû aux conditions d\'exploitation en zone de haute montagne ». - Le câble a fait l\'objet de différentes expérimentations pour développer son utilisation, à l\'instar de ce qui se pratique en Autriche notamment. - Dans le cadre du programme « compétitivité plus », des aides publiques ont aidé à la pérennisation de ce mode de débardage. - Dans le cadre du Plan de développement rural national (PDRN), plusieurs mécanismes de subventions à l\'exploitation et au débardage de bois par câble ont été mis en place, soit sous forme d\'aide à l\'installation du câble ou d\'aide au m3 sorti ou encore d\'aides à l\'hectare. - Pour améliorer les conditions de mobilisation du bois, il faut aussi porter une attention particulière à l\'entretien et l\'aménagement des dessertes forestières. Compte tenu de la topographie et des conditions climatiques, leur réalisation et leur entretien imposent des surcoûts importants. La réalisation de ces dessertes, pour lesquelles les collectivités locales acceptent, dans certains cas, de se constituer maîtres d\'ouvrage est rendue également plus difficile par le morcellement de la forêt privée entre de multiples propriétaires. La loi d\'orientation sur la forêt n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d\'orientation sur la forêt a aménagé deux dispositifs afin de faciliter la réalisation de ces dessertes forestières : - d\'une part, l\'article 33-XX modifie l\'article L. 151-36 du code rural pour préciser que les collectivités territoriales peuvent prescrire ou exécuter des « travaux de desserte forestière ou pastorale lorsqu\'ils présentent, du point de vue agricole ou forestier, un caractère d\'intérêt général ou d\'urgence ». L\'article L. 151-38 du code rural est également complété pour indiquer : « lorsque en application du 1° de l\'article L. 151-36 des travaux de desserte sont réalisés, l\'assiette des chemins d\'exploitation est grevée d\'une servitude de passage et d\'aménagement » ; - d\'autre part, l\'article 33-IV de la loi du 9 juillet 2001 modifie l\'article L. 321-5-1 du code forestier pour instaurer « en zone de montagne, une servitude de passage et d\'aménagement nécessaire à l\'enlèvement qui bénéficie à tout propriétaire ». Cette disposition résulte d\'un amendement défendu au Sénat par les membres du groupe d\'études sur la montagne afin de faciliter autant que faire se peut l\'exploitation forestière, y compris des fonds enclavés. (2) Les faiblesses de la filière bois en zone de montagne Comme le rappelait M. Michel Badré devant la mission commune d\'information : « les difficultés rencontrées par la filière forêt-bois renvoient à la problématique plus générale de la compétitivité mondiale de l\'industrie du bois résineux. Depuis une vingtaine d\'années, on assiste à une évolution extrêmement rapide qui a abouti à une concentration forte et à une compétition mondiale accrue. Le marché apparaît ainsi entièrement déterminé par les grands pays producteurs -Canada, Finlande, Suède et Russie- et les pays fortement consommateurs -Etats-Unis, Japon et Europe de l\'Ouest-, en particulier la Grande Bretagne, l\'Allemagne, et, dans une moindre mesure la France ». Plus généralement, si la forêt tient une large place dans l\'occupation de l\'espace montagnard, son poids dans les activités et l\'emploi n\'est cependant pas suffisant pour en déterminer l\'évolution économique et sociale. Certes, à un niveau très local, la forêt peut être en mesure d\'offrir un nombre significatif d\'emplois, d\'induire un développement touristique particulier et de jouer un rôle important dans la vie sociale, mais, force est de constater que, dans les douze départements où 80 % de la forêt sont en montagne, la sylviculture n\'occupe que 4 % des actifs du secteur primaire et la filière-bois (comprise ici comme l\'ensemble sylviculture, exploitation forestière, travail du bois, industries de l\'ameublement et du papier-carton) 1,7 % de l\'emploi total. L\'économie rurale de beaucoup de régions montagnardes s\'est progressivement diversifiée dans d\'autres activités (tertiaire, santé, tourisme...) et surtout la répartition des entreprises de la filière-bois ne répond pas toujours à des logiques de proximité de la ressource, et nombre d\'emplois induits par la production forestière échappent-ils en partie à la montagne. Cette dernière remarque est moins vraie pour les entreprises de première transformation (sciage pour l\'essentiel). Ainsi, environ 1.289 d\'entre elles sont localisées en zones de montagne et elles induisent près de 40 % des emplois de l\'activité de sciage en France. Elles sont généralement de petite taille, 16 seulement dépassent 50 salariés. Il est cependant certain qu\'une partie de la production montagnarde de bois est sciée dans des entreprises situées en périphérie. En effet, on note qu\'en zone de montagne il y a 1,7 emploi de sciage pour 1.000 ha de superficie de production, alors que ce même ratio s\'établit à 2,8 dans les zones de plaine des départements situés partiellement en montagne. La géographie des entreprises de seconde transformation montre qu\'elles sont principalement localisées dans des basses vallées, à proximité de grands centres urbains ou de zones portuaires. Les principales difficultés que rencontrent les entreprises et qui ont été évoquées devant la mission commune d\'information, lors de ses déplacements dans le sud du Massif central et le Jura, concernent la pénurie de main d\'oeuvre, les surcoûts d\'exploitation, l\'enclavement, la longueur des transports pour les scieries installées en zone de montagne et le coût des investissements. Ainsi l\'investissement nécessaire pour un matériel de séchage ne peut être amorti que sur un volume de production de sciage suffisant. Une petite scierie dont l\'activité oscille entre 4.000 et 5.000 m3 par an ne peut pas s\'équiper d\'un tel matériel alors que le marché est demandeur de bois séchés. Pour toutes les entreprises de sciage -et pas seulement celles situées en zone de montagne- qui peuvent consentir ces investissements, la loi d\'orientation du 9 juillet 2001 sur la forêt a mis en place un dispositif d\'amortissement spécifique pour la période 2001-2005. En effet, l\'article 71 de la loi autorise les entreprises de la première transformation du bois à pratiquer, pour les matériels de production, de sciage ainsi que de valorisation des produits forestiers, le taux d\'amortissement dégressif en vigueur, majoré de 30 %. 2. Garantir la multifonctionnalité des forêts de montagne La mission commune d\'information est convaincue de l\'intérêt qu\'il y a à encourager la multifonctionnalité des forêts de montagne, ce qui suppose une amélioration des conditions de la fonction productive des forêts garante des fonctions écologiques et sociales qui s\'amplifient. (1) Soutenir la fonction productive de la forêt Pour permettre une meilleure valorisation des ressources forestières en montagne, il convient d\'encourager le regroupement des parcelles, pour parvenir à des unités d\'exploitation pertinentes. S\'agissant des petites parcelles, il convient de mentionner que l\'article 69 de la loi du 9 juillet 2001 d\'orientation sur la forêt exonère du droit fixe d\'enregistrement (1.500 F) les apports à un groupement forestier existant, constitués de terrains de bois ou à boiser, d\'une surface inférieure à 5 ha et d\'un montant inférieur à 50.000 francs. Plusieurs dispositifs ont également été adoptés pour favoriser le regroupement des sylviculteurs pour leurs opérations de gestion et de commercialisation. Ainsi l\'article 32 de la loi introduit une procédure spécifique pour les zones de montagne, permettant à une association forestière autorisée par le préfet, à gérer des parcelles dont les propriétaires n\'ont pu être identifiés au bout d\'un délai de dix huit mois à compter de la décision préfectorale d\'autorisation. Ces propriétaires non identifiés sont présumés avoir délaissé sans contrepartie leur droit de propriété sur le bien. Selon les informations transmises à votre rapporteur, un décret d\'application est à l\'étude. Proposition n° 6. : Appliquer l\'article 32 de la loi du 9 juillet 2001 d\'orientation sur la forêt reconnaissant en zone de montagne à une association foncière forestière un droit de délaissement sur des parcelles dont les propriétaires n\'ont pu être identifiés. Il convient, par ailleurs, de se féliciter que le statut juridique et les conditions d\'agrément des organismes de gestion et d\'exploitation forestière en commun (OGEC) fasse l\'objet d\'un décret d\'application à paraître très prochainement. Ce dispositif donne une base légale à des organismes qui concourent de façon significative à la structuration de l\'amont de la filière forêt-bois, par le regroupement technique et économique de producteurs forestiers à un niveau macro-économique pertinent. S\'agissant des aides financières, certains dispositifs mis en place prennent en compte les handicaps et les surcoûts des forêts de montagne, comme prévu par l\'article L. 7 du code forestier. Les dispositifs d\'aides aux investissements forestiers sont fixés pour 2001-2006 dans le volet forestier du plan de développement rural national (PDRN) et repris dans deux circulaires : - la circulaire DERF/SDF/C2000-3021 du 18 août 2000 relative aux conditions de financement par le budget de l\'Etat des projets de boisement, reboisement, de conversion, d\'amélioration, d\'équipement en forêt de production et des outils d\'aide à la gestion ; - la circulaire DERF/C2001-3010 du 7 mai 2001 relative aux conditions de financement par le budget de l\'Etat des projets d\'investissements forestiers ou d\'actions forestières à caractère protecteur, environnemental et social. D\'une manière générale, les conditions de mise en oeuvre de ces deux circulaires ne prévoient pas de chapitre spécifique consacré aux investissements en forêt de montagne. Par contre pour prendre en compte les conditions naturelles et la situation particulière des forêts de montagne le taux de subvention, établi de manière forfaitaire au niveau régional, est majoré de 10 % pour les opérations en zone de montagne et remplissant les conditions de handicap de relief ou de desserte fixée au niveau régional. Une majoration supplémentaire de 10 % peut également compléter le taux de subvention pour les opérations situées dans les zones géographiques prioritaires retenues pour l\'attribution des aides communautaires au développement rural. Deux autres possibilités de majoration (zone d\'intérêt écologique dit Natura 2000, opérations groupées) existent mais elles ne concernent pas spécifiquement les zones de montagne. La majoration maximum du taux de subvention est fixée à 20 %. (2) Mettre en place les contreparties exigées par la fonction de protection des forêts D\'ores et déjà la circulaire du 7 mai 2001 contient un chapitre spécifique « restauration des terrains en montagne » lié au caractère spécifique de certains massifs forestiers de montagne dans la mise en oeuvre de la politique de prévention des risques naturels. Pour les massifs forestiers concernés par ce rôle de protection, les travaux pouvant bénéficier des aides de l\'Etat concernent la zone située à la source du phénomène pour réduire la probabilité d\'apparition du phénomène gravitaire et dangereux (protection active). En outre, la mise en oeuvre de l\'article 32 du RDR rédigé sur l\'initiative de la France pour prendre en compte le rôle protecteur et écologique d\'intérêt public des forêts, notamment de montagne, est un outil financier nouveau dont les conditions de mise en oeuvre ont été transcrites dans la mesure i.7.1 du PDRN. Dans le cadre du PDRN, en application du règlement CE n° 1257/1999, il s\'agit de mettre en place un dispositif de financement pour aider à la préservation et l\'amélioration de la stabilité écologique des forêts remplissant un rôle protecteur d\'intérêt public. Il s\'agit d\'une aide annuelle versée pendant toute la durée du contrat (5 à 10 ans) souscrit par le bénéficiaire sous la forme de paiements compensatoires. Ces paiements comprennent la prise en compte du déficit créé entre le montant de l\'opération projetée et la valeur du revenu cadastral des parcelles comprises dans le périmètre du projet. Ces opérations peuvent bénéficier d\'un financement de l\'Etat, éventuellement complété par les collectivités territoriales, l\'ensemble étant cofinancé à hauteur de 40 % des dépenses publiques par la Communauté européenne. Sont concernées par ces paiements compensatoires, les forêts détenues par les collectivités locales (communes et association de communes, sections) ainsi que les forêts privées. Ces forêts devront avoir un rôle reconnu de protection d\'intérêt publique soit physique ou à caractère de prévention des feux de forêts. Le coût des mesures envisagées de gestion devra être supérieur au produit d\'exploitation ordinaire de la forêt. Source : Direction de l\'espace rural et de la forêt, ministère de l\'agriculture, de l\'alimentation, de la pêche et des affaires rurales 234.000 hectares de forêt de montagne sont concernés ainsi qu\'environ 175.000 hectares de forêts à caractère de prévention des feux de forêt. Il est envisagé de traiter le dixième de cette surface dans un premier temps, c\'est-à-dire pendant la durée d\'application du PDRN (jusqu\'en 2006). Le propriétaire de la forêt demandeur d\'une aide devra démontrer le déficit économique en calculant d\'une part son produit d\'exploitation moyen annuel sur une période référence (le plus souvent 20 à 30 ans) et d\'autre part le coût moyen annuel des mesures envisagées (sur la durée du contrat). En cas de déficit avéré il pourra alors bénéficier du versement de paiements compensatoires dont le montant ne peut être inférieur à 40 euros par hectare et par an, ni supérieur à 120 euros par hectare et par an. Les prévisions d\'engagements des crédits d\'Etat font apparaître une moyenne annuelle d\'environ 2 millions d\'euros répartis sur 14 ans. La mission commune d\'information se félicite de la prochaine mise en place de ce dispositif financier pour aider à la préservation et à l\'amélioration de la stabilité écologique des forêts de montagne. Au delà, -et dans le cas où les propriétaires privés ne souhaitent plus ou ne peuvent plus assumer le coût d\'entretien de cette fonction de protection- , il pourrait être justifié de faciliter l\'achat de ces parcelles par les collectivités locales. Comme le suggère, notamment l\'association des communes forestières de Haute-Savoie, il pourrait être instauré un droit de préemption au profit des communes, au moment de la mise en vente des parcelles forestières ayant vocation de forêt de protection d\'intérêt général. Proposition n° 7. : Instaurer un droit de préemption au profit des communes, au moment de la mise en vente de parcelles forestières ayant vocation de forêt et de protection d\'intérêt général. (3) Soutenir les actions en faveur du « bois énergie » en zone de montagne En matière d\'énergies renouvelables, le bois joue un rôle central dans les zones de montagne. Le bois reste un secteur de consommation d\'énergie important pour la France, puisque 5 % de l\'énergie qui y est consommée provient du bois. Le bois est la deuxième énergie de chauffage des ménages. Il est surtout utilisé dans les maisons individuelles du secteur rural. Ainsi, la consommation du secteur rural est-elle de 8,5 millions de tonnes équivalent pétrole. On assiste toutefois aujourd\'hui à une certaine tendance au recul, dans la mesure où le bois est un mode de chauffage qui reste souvent l\'apanage de personnes âgées ou de maisons présentant des standards de confort assez faibles. Pour le chauffage domestique au bois, l\'ADEME a engagé trois actions majeures. Tout d\'abord, elle encourage le développement de systèmes de chauffage plus performants. Dans cet esprit, a été lancé, avec l\'ensemble des producteurs de matériel de chauffage existants en France, le label Flamme Verte. Son objectif est d\'améliorer de 10 % le rendement des systèmes de chauffage, ce qui revient à réduire « la corvée de bûches ». Le second axe d\'action porte sur la caractérisation du bois pour mieux informer le consommateur. Dans ce cadre, une marque NF doit être mise en place en partenariat avec des producteurs de bois de chauffage. Enfin, en vue de soutenir l\'utilisation du bois comme énergie d\'appoint, l\'action développée par l\'ADEME consiste à associer le bois à d\'autres énergies, comme par exemple l\'électricité. Ce type de solution se développe très rapidement, notamment dans les zones périurbaines et chez des ménages jeunes. Compte tenu de ces efforts de relance, on peut envisager d\'accroître d\'ici à 2010 la consommation de bois dans le chauffage domestique des ménages de plus de deux millions de tonnes équivalent pétrole. A côté des actions menées dans le domaine de l\'habitat individuel, l\'ADEME encourage le développement de petits réseaux de chaleur, c\'est-à-dire adaptés au chauffage de petits hôpitaux ou de bâtiments communaux (écoles, HLM, etc.) avec un objectif de 1.000 chaufferies collectives et industrielles d\'ici à 2006. Le rythme actuel, qui atteint 150 installations par an, devra donc être accru. Les systèmes mis en place équivalent d\'ores et déjà à un transfert vers le bois d\'une consommation annuelle de 50.000 tonnes d\'équivalent pétrole ; ils présentent l\'intérêt de permettre une substitution des importations d\'énergie par du travail dans les zones qui ont le plus besoin d\'emplois. Ces actions portent sur des programmes qui concernent essentiellement la moyenne montagne : ils connaissent plus de succès dans les Vosges, le Jura et le Massif central que dans les Alpes et les Pyrénées. Actuellement, le montage de projets collectifs bois représente un investissement total de 50 millions d\'euros. Proposition n° 8. : Conforter les financements de l\'ADEME en faveur de projets soutenant le bois-énergie (4) Encourager la mise en place des chartes forestières de territoire Afin que la forêt, notamment de montagne, assure un concours plus actif dans l\'aménagement et le développement des territoires, la Charte Forestière de Territoire (CFT), créée par l\'article L.12 du code forestier et introduite par la loi d\'orientation sur la forêt, ouvre la voie aux modes contractuels pour prendre en compte des problématiques spécifiques à la forêt sur un territoire donné. La création de ce nouvel outil permet de conforter le rôle de la forêt dans les politiques d\'aménagement et le développement durable des territoires, tout en favorisant l\'implication des collectivités dans les évolutions de la politique forestière locale. L\'Etat encourage ainsi les acteurs professionnels et institutionnels locaux à négocier les conditions de satisfaction des demandes particulières dont le massif forestier est l\'objet. Selon la nature des problématiques traitées, l\'Etat peut s\'associer et financer le contrat. Ce dispositif doit notamment permettre de promouvoir et valoriser certains biens et services actuellement non marchands auxquels la société accorde de plus en plus de valeur, et d\'assurer ainsi une juste rémunération de certains services rendus par les forêts dès lors qu\'une demande formalisée est identifiée et qu\'un contrat prenant en compte le coût de satisfaction de cette demande particulière est librement négocié. Mais elle permet également d\'envisager la contractualisation des approvisionnements d\'une scierie, ou toute autre industrie de première transformation du bois, sur un massif forestier d\'une certaine ampleur, au-delà des différents types de propriété, et contribuer ainsi au développement économique et social des territoires montagnards. La charte favorise la rencontre entre les prestataires de biens et services que sont les propriétaires forestiers, et des demandeurs responsables, motivés par un ou plusieurs de ces biens et services, par une évolution de la sylviculture au service d\'un objectif précis, voire par l\'avenir global d\'un territoire forestier. Les chartes forestières de territoire, signées pour une durée déterminée, portent donc sur un territoire identifié a priori comme pertinent vis-à-vis d\'une ou plusieurs problématiques, selon la logique suivante : une problématique conduisant à une offre et à une demande identifiées, des acteurs, un territoire, un contrat. La charte forestière de territoire regroupant les projets individuels dans une approche globale sur un territoire donné permet de faire bénéficier, les porteurs de projets, d\'une majoration des aides de l\'Etat de 10 %. De même, la charte de territoire forestier est le support idéal pour la mise en oeuvre des paiements compensatoires définis à l\'article 32 du RDR et déclinés dans la mesure i.7.1 du plan de développement rural national. Actuellement 20 chartes sont à l\'étude dont 10 en zone de montagne. Deux chartes forestières de territoire ont été signées début janvier 2002. Elles concernent des territoires de montagne : le parc naturel régional des Bauges (Savoie et Haute-Savoie) et la communauté de communes du Pays de Murat (Cantal). Le dispositif est intéressant, mais il gagnerait à être simplifié sur le plan de la procédure. Il conviendrait, notamment, de désigner un chef de file unique sur le plan administratif pour piloter le projet de charte. 3. Pour une politique de la forêt de montagne reconnue au niveau européen Les forêts de montagne représentent un tiers des forêts d\'Europe. Diversifiées, dans un milieu naturel et socio-économique fragile, elles restent une richesse, un moyen de protection contre les risques naturels, une source d\'emplois et de revenus pour les populations aussi bien de montagne que de plaines. En 1995, le Conseil Supérieur de la Forêt et des Produits Forestiers, fixait dans quinze propositions les axes d\'une politique en faveur des forêts de montagne en France. L\'Observatoire Européen des Forêts de Montagne (OEFM) a été mis en place en 1996 suite à une de ces propositions, avec l\'appui de la Fédération Européenne des Communes Forestières et le soutien financier du Ministère français en charge de la forêt, de l\'Office National des Forêts et de la Région Rhône-Alpes où il se situe. En 1998, les ministres européens et la Commission confient à l\'OEFM le mandat de coordination internationale de la Résolution S4 « Forêts de montagne » de la Conférence pan-européenne sur les forêts, en collaboration avec la FAO, Nations Unies. Aux vingt-cinq pays signataires actuels s\'ajoute le Royaume-Uni qui a officiellement annoncé sa volonté se signer la Résolution S4 lors de la prochaine Conférence ministérielle de Vienne en 2003. Depuis, l\'OEFM a produit, avec le soutien financier de la Commission européenne, le Livre Blanc de la forêt de montagne en Europe en se situant comme un outil fédérateur entre les acteurs locaux (propriétaires privés et communes forestières), les régions, les états, l\'Europe, les Nations Unies et les organisations concernées, y compris les scientifiques. Aujourd\'hui, l\'OEFM qui est basé en France, est une institution reconnue et incontournable dans les initiatives d\'échange, de suivi et de propositions dans les domaines technique, scientifique, économique et politique. Actuellement, trois perspectives se dessinent : - l\'adhésion des régions d\'Europe, au même titre que les parties signataires de la S4 ; - l\'identification des massifs transfrontaliers pour une définition de lignes directrices harmonisées dans les domaines de la production du bois, la protection des sites, la lutte contre les risques et le développement des loisirs ; - l\'expérimentation commune en Europe de mesures et d\'initiatives de développement, conservation, gestion et formation. Dans cette perspective européenne, il pourrait être intéressant de développer, s\'agissant des Alpes et des Pyrénées, une coordination plus étroite en matière forestière respectivement avec l\'Italie et l\'Espagne, dans le cadre de plans de développement forestier par massif ainsi que dans des chartes forestières de territoire trans-frontalières. L\'OEFM pourrait se voir confier ce rôle de coordination et de transfert de savoir-faire. Il convient, comme le souligne la Fédération des communes forestières, au sein des organismes nationaux concernés par la montagne, de renforcer l\'OEFM en tant qu\'outil permanent au service de la conservation et du développement des régions de montagne dans une perspective aussi bien nationale qu\'européenne. Proposition n° 9. : Soutenir financièrement les actions menées par l\'OEFM en faveur des forêts de montagne. III. RENFORCER LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS Les risques naturels sont beaucoup plus fréquents en zone montagnarde que sur la moyenne du territoire national. Près des trois quarts des communes de montagne sont soumis à un au moins des risques inondations, séismes, mouvements de terrain, avalanches ou feux de forêts, contre une commune sur deux à l\'échelle nationale. Dans les Alpes, un quart des communes en cumule au moins quatre. Ainsi, le bilan des avalanches établi pour 2001 -année considérée comme relativement clémente- s\'établit comme suit : Départements Nombre de couloirs suivis Nombre d\'avalanches observées 74 668 52 73 1 114 223 38 653 89 05 854 269 04 150 83 06 229 99 66 35 0 09 78 40 31 86 5 65 193 2 64 78 28 Total 4 138 890 Source : Rapport RTM 2001 Le nombre de morts, qui s\'établit à 28, est légèrement en dessous de la moyenne des 30 dernières années, alors que la fréquentation de la montagne est en augmentation. A signaler d\'autre part qu\'aucune victime n\'est à déplorer dans les zones où le public s\'estime sécurisé (habitations, routes, pistes de ski ...). Pour les autres risques, 253 événements ont été recensés : 167 pour les Alpes du Nord, 80 pour les Alpes du Sud et 6 pour les Pyrénées. Il s\'agit principalement de glissements de terrain (103), mais aussi de crues torrentielles (65) et d\'instabilités rocheuses. D\'où l\'importance stratégique de mener une politique de protection efficace mais également de prévenir les conséquences de ces phénomènes naturels. A. POUR UNE RÉNOVATION DE LA POLITIQUE DE RESTAURATION DES TERRAINS EN MONTAGNE (RTM) 1. L\'importance historique du service RTM a) Définition d\'une politique RTM dans la seconde moitié du XIXe siècle (1) Apparition d\'une « idéologie » de la restauration et du boisement Jusqu\'à la fin du XVIIIe siècle a perduré l\'idéologie du défrichement. Le bois, produit industriel, devait répondre à la consommation croissante des manufactures et de la marine. L\'intérêt et la nécessité du reboisement n\'apparaissent que progressivement. Ce mouvement est accompagné par l\'émergence d\'une doctrine technique faisant appel au génie biologique puis civil pour défendre l\'idée d\'une « forêt de protection ». Plus prosaïquement, la première loi votée en 1860 le fut sous la pression de catastrophes naturelles, en l\'occurrence des crues survenues sur la plupart des grandes rivières entre 1845 et 1860 et ces phénomènes d\'inondation ont occasionné un grand nombre de victimes et de dégâts. (2) Mise en place progressive et laborieuse du cadre législatif Abrogée en 1874, la loi adoptée en 1860 était avant tout une loi de boisement systématique, imposée par l\'Etat centralisé, fondé sur l\'expropriation et qui a rencontré les plus vives oppositions des populations locales. L\'objectif affiché portait sur plus de 1,3 millions d\'hectares. Outre le coût très élevé de ce dispositif pour les finances publiques, il est apparu que le boisement devait s\'accompagner d\'autres mesures pour régler des cas d\'érosion extrêmes. Adoptée en 1864, la loi pour le « ré-engazonnement » des montagnes mettait l\'accent sur la reconstitution d\'un couvert végétal ce qui autorisait les activités de pastoralisme, enjeu essentiel pour l\'activité locale. La loi de 1882 sur la restauration des terrains de montagne fonde alors le dispositif actuel en instituant les « périmètres RTM », zones expropriables par l\'Etat. Sur les zones réellement expropriées dites « séries RTM » ont été mis en place des boisements mais également des ouvrages de protection. b) La mise en oeuvre de la politique RTM (1) « L\'âge d\'or » (1882 -1914) Pendant cette période, sont réalisés la plus grande partie des travaux et des ouvrages, souvent de très grande importance, mobilisant des moyens financiers et humains considérables. 1.100 torrents ont été traités, une centaine de couloirs d\'avalanches et plus de 100 glissements de terrain. Les 177 périmètres RTM définis ont permis de prendre en compte 300.000 hectares. Vingt six départements sont alors couverts par un service RTM. (2) L\'âge de la gestion (1914-1940) Comme dans tous les pays alpins, les difficultés économiques et les effets démographiques dus à la première guerre mondiale entraînent un fort ralentissement dans la politique d\'acquisition et de travaux « neufs ». En France, la seconde guerre mondiale va accélérer cette évolution. Entre 1940 et 1980, et malgré des besoins d\'entretien de plus en plus importants, on constate une réduction tendancielle des crédits, aggravée par un renchérissement du coût de la main d\'oeuvre. 2. Vers une rénovation en profondeur du service RTM a) La réforme du service RTM en 1980 Cette évolution importante dans la définition du service et de ses missions s\'inscrit dans le contexte dramatique des accidents de Val d\'Isère et de Passy en 1970 qui a mis l\'accent sur le risque d\'avalanche et sur les moyens de protection des personnes et des biens à mettre en place. Le développement du tourisme en montagne imposait cette évolution. La création du service RTM se traduit alors par un recentrage territorial fort et par la diversification de ses missions. (1) Réduction de l\'implantation territoriale La couverture territoriale du service RTM se limite désormais à onze départements de haute montagne, où s\'exerce « une érosion active et à haut risque ». Ils se répartissent ainsi : Alpes du Nord : Haute-Savoie, Savoie, Isère ; Alpes du Sud : Hautes-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence et Alpes-Maritimes ; Pyrénées : Pyrénées-Orientales, Ariège, Haute-Garonne, Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Atlantiques. Dans les départements où l\'érosion est moins active, « la gestion normale des peuplements constitués » est confiée à l\'Office national des forêts au titre des forêts domaniales. Lorsque la mission commune d\'information s\'est interrogée sur l\'utilité de disposer de services RTM dans les autres départements, notamment pour pouvoir disposer de leur capacité d\'expertise et d\'intervention, la réponse apportée a été malheureusement d\'ordre budgétaire ! Comme le soulignait M. Yves Cassayre13(*) : « Ceci ne semble pas être à l\'ordre du jour : actuellement, le financement du service RTM est tenu à bout de bras par le ministère de l\'Agriculture. Chaque année, les discussions sont âpres pour que le financement ne soit pas revu à la baisse ». La multiplication des phénomènes climatiques brutaux, aux conséquences dramatiques tant en vies humaines qu\'en ce qui concerne l\'activité économique, conduit néanmoins à s\'interroger sur l\'éventuelle nécessité de doter de nouveaux départements d\'un service RTM. (2) La forte diversification des missions du service RTM Aux tâches traditionnelles de gestion patrimoniale des terrains domaniaux RTM sur lesquels on recense 20.000 ouvrages, se sont ajoutées des missions tendant à assurer la sécurité « directe » des personnes et des biens. Selon les départements, et en fonction de l\'implication plus ou moins grande des collectivités territoriales, ces nouvelles missions occupent une part croissante des services RTM. Ces nouvelles activités portent sur : - la cartographie réglementaire des risques naturels. Dans les années 1970, cette cartographie a été initiée en zone de montagne à travers la cartographie des avalanches, confiée au CEMAGREF (Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et forêts), les cartes des zones d\'exposition au risque du mouvement de sol et du sous-sol (cartes ZERMOS), les plans des zones exposées aux avalanches (PZEA) et les plans des zones exposées aux risques naturels (PZERN). La loi du 22 juillet 1987 modifiée par la loi du 2 février1995 met en place les plans de prévention des risques naturels et fusionne ces différentes cartographies au sein du PER (plan d\'exposition aux risques naturels prévisibles) qui devient le PPR (plan de prévention des risques naturels) ; - la prise en compte des risques naturels dans l\'aménagement et l\'urbanisme. A la demande des services déconcentrés de l\'Etat en charge de l\'urbanisme et de l\'aménagement ainsi que des communes, les services RTM sont de plus en plus sollicités à l\'occasion de l\'instruction des autorisations d\'urbanisme. Les tableaux ci-dessous recensent ces différentes interventions : PLANS LOCAUX D\'URBANISME À L\'ÉTUDE EN 2001 Nbre de « porté à connaissance » Nbre de PLU « vérifiés » Nbre de participations à des réunions communales Haute-Savoie 20 38 13 Savoie 71 17 30 Isère 31 24 29 Hautes-Alpes 17 17 39 Alpes-de-Haute-Provence 2 5 1 Alpes-Maritimes 20 3 3 Pyrénées-Orientales 1 11 16 Ariège 14 0 0 Haute-Garonne 0 0 0 Hautes-Pyrénées 15 6 0 Pyrénées-Atlantiques 0 0 0 TOTAL 191 121 131 Source : Rapport RTM 2001 ENQUÊTES ALÉAS-ENJEUX-RISQUES EN 2001 Nombre de communes à l\'étude en 2001 dont mis à l\'étude en 2001 achevées en 2001 Haute-Savoie 1 0 0 Savoie 9 0 0 Isère 39 8 30 Hautes-Alpes 0 1 2 Alpes-de-Haute-Provence 0 0 0 Alpes-Maritimes 1 1 0 Pyrénées-Orientales 0 0 0 Ariège 0 0 0 Haute-Garonne 0 0 0 Hautes-Pyrénées 0 0 0 Pyrénées-Atlantiques 0 0 0 TOTAL 50 10 32 Source : Rapport RTM 2001 DOSSIERS PONCTUELS 2001 U.T.N. P.I.D.A. Avalanches Permis de construire ou certificats d\'urbanisme dont remontées mécaniques Haute-Savoie 8 3 587 29 Savoie 16 0 350 20 Isère 0 2 433 9 Hautes-Alpes 3 4 516 3 Alpes-de-Haute-Provence 1 0 499 2 Alpes-Maritimes 0 0 48 2 Pyrénées-Orientales 0 5 383 4 Ariège 1 2 350 2 Haute-Garonne 0 0 25 0 Hautes-Pyrénées 1 4 222 21 Pyrénées-Atlantiques 1 0 12 3 TOTAL 31 20 3 425 95 Source : Rapport RTM 2001 Comme cela a été souligné devant la mission commune d\'information, la plupart des services ont atteint le seuil de saturation : - La sécurité publique. Les services RTM interviennent de plus en plus fréquemment, à la demande du Préfet ou de maires confrontés à une situation de danger potentiel ou établi. Les questions à résoudre sont directement liées à la sécurité des personnes. En outre, les services RTM peuvent être amenés à élaborer les dossiers techniques d\'aide à la reconnaissance de catastrophe naturelle. - Participation aux travaux de protection réalisés par les communes. En complément des travaux effectués par l\'Etat, la plupart des communes souhaitent, en complément ou en substitution, organiser la protection rapprochée de certains immeubles ou infrastructures. Une partie de ces travaux sont subventionnés par l\'Etat -sur des crédits RTM-, les régions et les départements dans le cadre des contrats de plan Etat-Région ou des nouvelles conventions de massifs (Alpes et Pyrénées). En 2001, le montant des travaux réalisés par les communes s\'élevait à 90,71 millions de francs, répartis comme suit : - Etat : 18,56 % - Région : 15,31 % - Département : 7,38 % - Europe : 1,67 % - Commune : 54,89 % - Autres : 2,18 % Au total, les travaux réalisés par les services RTM s\'élèvent à 154,28 millions de francs en 2001 répartis comme suit : REGIONS Gestion patrimoniale Travaux des Communes TOTAL GÉNÉRAL ADMINISTATIVES Entretien + Travaux neufs Travaux neufs M.F. % RHÔNE-ALPES 27,451 49,846 77,297 50,10 PROVENCE-ALPES-CÔTE D\'AZUR 28,910 11,970 40,880 26,50 LANGUEDOC-ROUSSILLON 5,262 2,885 8,147 5,28 MIDI-PYRÉNÉES 17,799 7,538 25,337 16,42 AQUITAINE 0,000 2,623 2,623 1,70 TOTAL 79,422 74,862 154,284 100 Source : Rapport RTM 2001 Les travaux d\'investissement et d\'entretien ont été consacrés pour 70 % à la correction torrentielle, 12 % au risque avalanche et 11 % aux chutes de pierres. b) Une clarification nécessaire des moyens budgétaires et des compétences (1) Des moyens budgétaires à renforcer S\'agissant des moyens budgétaires alloués à la gestion des terrains en montagne, force est de constater -pour le regretter- leur faible progression. - Entre 1991 et 2000, en ce qui concerne les crédits d\'entretien, la dotation travaux a été simplement reconduite ou en forte diminution en 1995, 1997 ou 1999. Une remise à niveau semble néanmoins s\'amorcer comme le montre le tableau ci-dessous. EVOLUTION DE LA LIGNE BUDGETAIRE 35.92 - 90.92 Travaux d\'entretien RTM et coût du service depuis 10 ans (en euros) CREDITS OUVERTS 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 8.761.301 9.213.758 9.174.558 8.200.122 9.368.664 8.360.021 10.229.307 10.364.718 13.219.044 15.680.554 A déduire prix du service payé dans l\'année en cause 4.808.968 5.433.022 4.974.587 5.821.918 6.140.784 6.225.734 6.387.592 7.314.213 7.174.440 7.219.633 Dotation Travaux 3.952.332 3.780.736 4.199.970 2.378.205 3.227.880 2.134.286 3.841.715 3.050.505 6.044.604 8.460.920 Travaux ------------------------ % Crédits ouverts 45,11 41,03 45,78 29,00 34,45 25,53 37,56 29,43 45,73 53,96 - La diminution des crédits d\'investissement est encore plus marquée sur la même période, la tendance s\'inversant cependant à partir de 1998. CREDITS D\'INVESTISSEMENT (CHAPITRE 51.92 - ART. 90.92) Evolution des enveloppes annuelles (en euros - hors réaffectations) ANNEE EUROS COURANTS EUROS 2001 1982 2.355.337 4.117.130 1983 3.111.866 4.963.426 1984 3.249.070 4.824.869 1985 3.384.368 4.748.269 1986 3.296.474 4.506.280 1987 3.244.115 4.298.452 1988 3.384.368 4.365.835 1989 3.704.511 4.612.116 1990 4.283.817 5.162.000 1991 5.183.267 6.048.872 1992 3.236.035 3.689.080 1993 2.240.238 2.502.346 1994 2.530.654 2.781.188 1995 2.286.735 2.469.674 1996 1.753.164 1.856.600 1997 2.134.286 2.232.463 1998 2.805.062 2.914.459 1999 2.949.257 3.049.531 2000 3.384.521 3.442.057 2001 3.468.977 3.468.977 Source : Rapport RTM 2001 CRÉDITS D\'INVESTISSEMENT (CHAPITRE 51.92 - ART. 90.92) Autorisations de programme créées en 2001 (en euros) REGION Crédits du budget 2001 Rhône-Alpes 1.051.898 Provence-Alpes-Côte d\'Azur 1.349.936 Languedoc-Roussillon 228.674 Midi-Pyrénées 838.470 TOTAL 3.468.977 Source : Rapport RTM 2001 Compte tenu de l\'importance des travaux engagés par les services RTM pour assurer l\'entretien des ouvrages, renouveler les plus anciens ou réaliser des investissements pour assurer le maintien et la protection des terrains en montagne, la mission commune d\'information attache la plus grande importance à ce que les crédits budgétaires alloués soient préservés voire augmentés. Proposition n° 10. : S\'engager sur une hausse raisonnable des crédits d\'entretien et d\'investissements RTM (2) Une nécessaire clarification des compétences et des participations financières au sein de l\'Etat La diversification des missions confiées aux services RTM ne s\'est pas accompagnée d\'une clarification s\'agissant des donneurs d\'ordre. L\'implication du ministère de l\'agriculture et de la pêche sur le budget duquel sont inscrits les moyens du service RTM est clairement identifiée. Mais il n\'en est pas de même des autres ministères en charge de l\'équipement, de l\'environnement ou encore du ministère de l\'Intérieur. Lors de son audition, M. Yves Cassayre a été amené à déclarer : « Ainsi, je regrette fondamentalement que, depuis trente ans qu\'existe le ministère de l\'Environnement -et alors même qu\'il a logiquement été doté d\'un nombre croissant de compétences, notamment en matière de risques naturels-, ce ministère n\'ait pas pris en charge, au moins partiellement, les services RTM qui travaillent sur ce créneau ». Cette question est fondamentale pour assurer une meilleure lisibilité de l\'action de l\'Etat sur le terrain, et elle devrait permettre de conforter le financement des services RTM. Proposition n° 11. : Préciser les participations financières des différents services de l\'Etat aux missions remplies pour leur compte par les services RTM Plus généralement, on peut considérer que la politique de restauration des terrains de montagne doit se rénover en profondeur pour répondre aux nouvelles attentes de la société et ceci suppose une évaluation fine de celles-ci mais également des mécanismes de fonctionnement du service RTM. B. RENFORCER LA MISE EN PLACE DES PLANS DE PREVENTION DES RISQUES NATURELS (PPR) EN MONTAGNE 1. Un instrument indispensable en zone de montagne qui nécessite des moyens budgétaires supplémentaires a) Définition et contenu du plan de prévention des risques (1) Une politique globale de prévention des risques Le PPR s\'inscrit dans un ensemble de réflexions et de dispositifs de prévention des risques : - L\'information préventive des citoyens, prévue par l\'article 21 de la loi du 22 juillet 1987 relative à l\'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l\'incendie et à la prévention des risques majeurs. - La protection des lieux habités par des ouvrages réalisés par l\'Etat ou par les collectivités locales afin de contribuer à réduire la vulnérabilité de l\'existant et à améliorer les conditions de vie face aux risques. - Les plans de secours et d\'évacuation fixent à l\'avance les conditions d\'organisation de la gestion de crise dans les implantations soumises à un événement naturel. Le principe du PPR a été défini dans le cadre de la nouvelle politique de prévention des risques naturels définie par le comité interministériel du 24 janvier 1994. La circulaire interministérielle (Intérieur-Equipement-Environnement) du 24 janvier 1994 relative à la prévention des inondations et à la gestion des zones inondables précise ainsi les objectifs à atteindre : - interdire les implantations humaines dans les zones les plus dangereuses où la sécurité des personnes ne peut être intégralement garantie ; - préserver les capacités d\'écoulement et d\'expansion des crues pour ne pas aggraver les risques ; - sauvegarder l\'équilibre des milieux dépendant des petites crues et la qualité des paysages. Le PPR est régi par les articles L. 562-1 et suivants du code de l\'environnement qui reprennent les articles 40-1 à 40-6 de la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l\'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l\'incendie et à la prévention des risques majeurs, modifiée par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l\'environnement. Les modalités d\'application de cet outil réglementaire qui reprend, en se substituant en partie à eux, les plans d\'exposition aux risques (PER), les périmètres de risques délimités en application de l\'article R. 111-3 du code de l\'urbanisme, ainsi que les plans de surface submersibles (PSS), sont fixées par le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995. Le PPR a pour objet de délimiter les zones directement exposées à des risques, et d\'autres zones qui ne sont pas directement exposées mais où certaines occupations ou certains usages du sol pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux. Les documents d\'urbanisme doivent prendre en compte les risques naturels en application de l\'article L. 121-10 du code de l\'environnement. En conséquence, le PPR constitue une servitude d\'utilité publique qui s\'impose à tous et il doit notamment être annexé au plan local d\'urbanisme (PLU). Plus largement, l\'objectif du PPR est de prendre en compte les risques naturels dans l\'aménagement et le développement des territoires. (2) Contenu du plan de prévention des risques Le PPR relève de la responsabilité de l\'Etat. Celui-ci doit afficher le risque et prendre les mesures pour réduire la vulnérabilité. Avec le PPR, le préfet peut ainsi délimiter les zones exposées ou non directement exposées aux risques naturels comme les couloirs d\'avalanches et y définir les interdictions ou prescrire des conditions de réalisation, d\'utilisation ou d\'exploitation de nouvelles constructions. Il peut également définir des mesures de prévention (maintien du couvert forestier), de protection (réalisation d\'un ouvrage) et de sauvegarde (dispositif d\'alerte et d\'évacuation) à prendre par les particuliers et les collectivités territoriales. Il peut aussi, et surtout, définir des mesures d\'aménagement, d\'utilisation ou d\'exploitation des constructions et ouvrages existants que doivent prendre les propriétaires ou utilisateurs (renforcement des constructions, obstruction d\'ouvertures exposées, renforcement de toiture, interdiction de dépôts de matériaux, occupation temporaire). Ces deux types de mesures peuvent être rendus obligatoires dans un délai maximal de 5 ans avec exécution d\'office par l\'Etat si celles-ci n\'ont pas été réalisées aux échéances fixées. La stratégie adoptée pour l\'élaboration des PPR consiste à mobiliser les connaissances actuelles et des études qualitatives pour engager rapidement une démarche concertée et aboutir à un document lisible et opérationnel. Celle-ci passe par plusieurs étapes successives d\'élaboration de cartes. Une première étape de recueil des données historiques, des études et des connaissances locales doit aboutir à la carte informative des phénomènes. Puis la carte des aléas en trois niveaux est établie notamment à partir de l\'intensité du phénomène prévisible. Ensuite la carte des enjeux actuels et futurs va identifier les secteurs à traiter en particulier. Le croisement de ces deux cartes permet de définir la trame de la cartographie réglementaire où seront ainsi délimitées les zones inconstructibles ou constructibles sous conditions particulières. Le règlement des zones permettra de définir les conditions de nouvelles constructions, les mesures à prendre sur l\'existant et les mesures de prévention à prendre notamment par les collectivités publiques. Dans les départements de montagnes, l\'élaboration des PPR est essentiellement réalisée par les services de restauration des terrains en montagne (RTM) et les directions départementales de l\'équipement qui sont fortement mobilisées sur ce programme. Le PPR constitue ainsi une excellente procédure du point de vue du contenu mais aussi du point de vue de la sécurité juridique des élus et des services de l\'Etat. Il substitue à une série d\'avis donnés au coup par coup une stratégie globale et préalablement définie. b) Un bilan à conforter par un renforcement des moyens budgétaires (1) Une couverture encore insuffisante des zones de montagne Au 1er août 2002, sur la France entière, 3.300 communes sont dotées d\'un PPR approuvé tandis que 5.000 autres sont en cours d\'élaboration. Dans les départements à dominante montagneuse, essentiellement dans les massifs alpin et pyrénéen, la plupart des PPR élaborés présentent un caractère multirisque où le risque d\'inondation par crue torrentielle côtoie d\'autres aléas naturels et notamment celui de mouvement de terrain. Le tableau ci-dessous précise par département de montagne le nombre de communes ayant un PPR prescrit ou approuvé ainsi que les risques pris en compte. NOMBRE14(*) DE COMMUNES COUVERTES PAR UN PPR (PPR ET VALANT PPR -R 111.3 ET PER-) PAR DÉPARTEMENT DE MONTAGNE ET PAR RISQUE Tout risque confondu Inondation Mouvement de terrain Avalanche Séisme Incendie de forêt 04 Approuvé 27 25 21 5 18 0 Prescrit 6 6 5 3 5 0 05 Approuvé 5 3 5 3 2 0 Prescrit 20 21 20 20 16 0 06 Approuvé 38 20 25 0 12 5 Prescrit 28 16 7 0 2 19 38 Approuvé 19415(*) 190 176 90 19 0 Prescrit 8 7 7 9 14 0 73 Approuvé 29 25 10 8 9 0 Prescrit 45 48 29 14 16 0 74 Approuvé 85 85 73 48 0 0 Prescrit 21 21 21 5 12 0 Sous-total Approuvé 378 348 310 154 60 5 Alpes Prescrit 128 119 89 51 65 19 09 Approuvé 13 12 13 4 11 2 Prescrit 3 3 3 0 2 0 31 Approuvé 27 26 21 14 17 0 Prescrit 63 63 20 4 14 0 64 Approuvé 39 34 11 12 4 0 Prescrit 32 35 10 8 6 0 65 Approuvé 36 23 26 19 22 7 Prescrit 21 21 16 12 19 3 66 Approuvé 42 42 38 8 22 0 Prescrit 13 12 7 0 5 0 Sous-total Approuvé 157 137 109 57 76 9 Pyrénées Prescrit 132 134 56 24 46 3 39 Approuvé 10 72 0 0 0 0 Prescrit 94 1 0 0 0 0 88 Approuvé 11 0 0 0 0 0 Prescrit 94 0 0 0 0 0 2A Approuvé 28 0 0 0 0 0 Prescrit 9 0 0 0 0 0 2B Approuvé 26 0 0 0 0 0 Prescrit 32 0 0 0 0 5 Total Approuvé 610 557 419 211 136 14 montagne Prescrit 489 254 145 75 111 27 Source : base de données Corinte du ministère de l\'Ecologie et du développement durable NB : sont comptés comme PPR prescrits les PPR prescrits non approuvés La complexité des études en montagne rend leur élaboration difficile : on dénombre néanmoins dans les départements de montagne plus de 600 communes dotées d\'un tel document tandis que pour près de 500 autres il est en cours d\'élaboration. (2) Un renforcement des moyens budgétaires indispensable Il convient de souligner que des moyens financiers conséquents et en progression constante, assortis de moyens en personnels renforcés ont permis d\'accélérer le rythme d\'élaboration des PPR. En effet, en application de l\'article 55 de la loi de finances rectificative pour 1999, les dépenses de l\'Etat afférentes aux études nécessaires à la préparation et à l\'élaboration des PPR sont financées pour moitié par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs du 1er janvier 2000 au 1er septembre 2006. Ainsi, les crédits délégués aux services déconcentrés pour l\'élaboration des PPR sont passés de 4,03 millions d\'euros en 1998 à 12,48 millions d\'euros en 2000 et 15,88 millions d\'euros en 2002. L\'objectif ambitieux fixé à 5.000 PPR réalisés en 2005 sera vraisemblablement atteint mais selon M. Yves Cassayre, il serait souhaitable d\'accélérer encore la réalisation des PPR en montagne. Au-delà de ces objectifs quantitatifs, il convient de dégager des moyens budgétaires supplémentaires pour prendre en compte les spécificités territoriales. Comme le soulignait M. Philippe Huet, ingénieur général du génie rural des eaux et forêts à l\'Inspection générale de l\'Environnement lors de son audition, on ne peut en montagne réaliser un PPR avec les mêmes moyens qu\'en plaine : la discontinuité du relief, le caractère local et brutal des événements exigent des moyens complémentaires. Le coût d\'un PPR multirisques varie en France de 20.000 à 30.000 euros, mais dans le Val d\'Aoste, il s\'établit à 100.000 euros, car il comporte plus d\'études et une cartographie plus précise. La mission commune d\'information souhaite, pour assurer une meilleure efficacité des PPR, en enrichir le contenu, ce qui implique des moyens supplémentaires. Proposition n° 12. : Prendre en compte le « surcoût montagne » dans l\'élaboration des PPR